Vous avez entendu l’invitation que nous lançait le Seigneur dans la 1° lecture : Soyez saints, car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint. Et c’est parce que, déjà depuis longtemps, vous prenez cet appel au sérieux que vous êtes venus à cette messe. En effet, sans la grâce, nous n’avancerons jamais sur le chemin sur le sainteté.
Mais voilà, parfois, quand nous entendons cet appel à la sainteté, nous nous sentons disqualifiés en disant : je suis tellement loin d’être parfait que ce n’est pas pour moi ! Mais, Dieu soit loué, la sainteté n’a rien à voir avec la perfection ; vouloir devenir saint, ce n’est pas vouloir devenir parfaits. Même les plus grands saints se confessaient, ne confondons donc jamais sainteté et perfection !
Même quand Jésus nous invitera, dans l’Evangile, à devenir parfaits comme le Père du ciel, il ne nous invitera pas à la perfection ! En effet, quand Jésus dit : devenez parfaits comme votre Père du ciel, c’est comme s’il disait : laissez-vous parfaire par le Seigneur. Le cardinal Barbarin qui est en train de prêcher la retraite pour les prêtres de notre diocèse, aime commenter cette parole en précisant que le mot grec qui est utilisé pour dire « parfait » désigne plus la finalité que la perfection. Autrement dit, quand Jésus dit : laissez-vous parfaire, c’est comme s’il disait : vous n’êtes pas finis, alors laissez Dieu vous finir ! Quand on dit à quelqu’un qu’il n’est pas fini, habituellement, ce n’est pas un compliment ! Mais, là, dans la bouche de Jésus, ce n’est évidemment pas une parole méprisante, c’est une invitation : laissez le Père du ciel vous parfaire, laissez-le vous finir, laissez-le ajuster votre pauvre amour à son grand amour.
Ayant bien précisé cela, je dis quand même un mot de cette 1° lecture. Vous aurez remarqué que la sainteté à laquelle le Seigneur nous invite n’est pas une sainteté que je qualifierai de « religieuse ». Il ne nous demande pas d’abord de passer des heures en prière, il nous demande de vivre une sainteté bien concrète, bien incarnée qui se révèle finalement être un autre mot de la charité, mais d’une charité vécue jusqu’au bout. Alors bien sûr, comme nous en sommes incapables par nos propres forces, nous ne pouvons qu’aller vers le Seigneur, comme des pauvres mendier ces moments de cœur à cœur avec lui pour que l’amour de son cœur passe dans notre cœur, pour qu’il vienne parfaire notre amour. Ces moments de cœur à cœur, j’aime les présenter comme une mise à jour. Dans vos smartphones, si vous en avez, vous avez des applications qui, de temps en temps, nécessitent une mise à jour pour obtenir la dernière version. Eh bien, dans le cœur à cœur avec le Seigneur, c’est ce qui se passe, même si je ne ressens rien, je me présente à Lui en lui disant : je me rends disponible, fais les mises à jour qui s’imposent pour que mon amour soit restauré par la dernière version de ton amour !
Quant à l’Evangile, il est très beau : tout ce que vous avez fait à l’un de ces plus petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. Quel encouragement de savoir que c’est Jésus, lui-même, que l’on soigne, que l’on réconforte quand on se met au service des plus petits, de tous ces blessés de la vie, que la société de performance dans laquelle nous vivons, laisse au bord du chemin. Cet Evangile nous redit aussi ce que nous avons toujours besoin de réentendre, c’est-à-dire que nos péchés les plus graves sont des péchés par omission : nous nous confessons du mal que nous faisons et il le faut, mais est-ce que nous nous confessons du bien que nous ne faisons pas ?
Très bel Evangile, mais un peu flippant, comme disent les jeunes ! En effet, si nous le prenons au pied de la lettre nous ne pouvons pas ne pas nous poser cette question : de quel côté je serai ? De quel côté seront ceux que j’aime ? Oui, mais quand nous réfléchissons sérieusement, nous comprenons vite que personne n’est que bon ou que mauvais et que c’est donc en chacun de nous qu’il y a du bon et du moins bon. Le temps du carême nous est donc donné pour faire bouger la ligne de démarcation entre le bien et le mal, en nous, pour que le bien devenant plus envahissant, il fasse reculer le mal. C’est ce que nous demandons par l’intercession de Noter Dame de Laghet.