2 janvier : férie du temps de Noël. Fête de St Basile et St Grégoire qui dit la beauté de l’Amitié

Une fois n’est pas coutume, j’aimerais commencer en évoquant les deux saints que nous fêtons aujourd’hui parce qu’en les ayant réunis dans une même fête, l’Eglise nous livre un très beau message ! Saint Basile de Césarée et St Gégoire de Naziance sont deux grands saints de l’Eglise d’Orient du 4° siècle. Ce qui est très beau dans le fait que l’Eglise nous propose de les fêter ensemble c’est qu’ils étaient de grands amis. Ainsi donc l’Eglise veut nous montrer que l’Amitié, quand elle bien vécue, bien loin de nous détourner de notre vocation peut devenir un stimulant sur le chemin de la sainteté !

St Basile était un jeune homme très brillant qui accomplit ses études auprès des meilleurs maîtres d’Athènes et de Constantinople. Insatisfait de ses succès dans le monde, et s’étant rendu compte qu’il avait perdu beaucoup de temps en vanités, en futilités, il décide de changer de cap. Voilà ce qu’il dit : Un jour, comme me réveillant d’un sommeil profond, je me tournai vers l’admirable lumière de la vérité de l’Evangile…, et je pleurai sur ma vie misérable. Il deviendra moine, un moine qui ne se permettait aucun écart. Puis il sera prêtre et appelé à l’épiscopat pour devenir évêque de Césarée en Turquie actuelle. Voilà comment Benoit XVI que nous avons plaisir à citer en ces jours concluait le portrait qu’il avait fait de lui dans sa série de catéchèses consacrés aux Pères de l’Eglise : C’était un homme qui a véritablement vécu avec le regard fixé sur le Christ. C’était un homme d’amour envers son prochain. Empli de l’espérance et de la joie de la foi, Basile nous montre comment être réellement chrétiens.

St Grégoire était, lui aussi, un jeune homme brillant qui a fait de très bonnes études, c’est d’ailleurs au cours de ses études qu’il a rencontré Basile et voilà ce qu’il écrit à propos de leur Amitié : Non seulement je me sentais empli de vénération pour mon grand ami Basile, pour ses mœurs sérieuses et la maturité et la sagesse de ses écrits, mais j’en encourageais également d’autres, qui ne le connaissaient pas encore, à en faire autant… Nous étions guidés par le même désir de savoir… Telle était notre compétition :  non pas qui serait le premier, mais qui permettrait à l’autre de le devenir. On aurait dit que nous avions une unique âme et un seul corps. Et Benoit XVI dira de lui : C’est un homme qui nous fait comprendre que Dieu doit être le premier servi dans nos vies. Il parle également à notre monde et lui dit que sans Dieu, l’homme perd sa grandeur, sans Dieu, le véritable humanisme n’existe pas.

Que ces deux amis intercèdent pour nous afin que Dieu soit toujours premier servi dans nos vies et qu’ils nous aident à vivre une amitié fraternelle qui deviennent stimulante pour notre avancée sur le chemin de la sainteté.

Tout au long de cette semaine, comme c’était déjà le cas pour la semaine dernière, semaine de l’octave de Noël, c’est la 1° épitre de Saint Jean que l’Eglise nous donne à méditer dans les premières lectures. L’une des particularités de cette lettre, c’est qu’elle passe continuellement de grandes affirmations de foi à des remarques extrêmement concrètes concernant la vie des chrétiens. Un peu comme pour nous dire que « foi juste » et « comportement juste » iront toujours de pair. Jésus le disait également dans son enseignement : il ne suffit pas de me DIRE Seigneur, Seigneur, il faut FAIRE la volonté de mon Père. Une foi juste, une foi qui pousse à dire de beaux Seigneur, Seigneur dans la prière mais qui ne se traduit pas en actes concrets est une foi infirme. 

Alors, bien sûr, nous sommes tous pécheurs et nous ne réussirons jamais à vivre parfaitement la foi que nous professons, mais nous devons chercher, avec la grâce de Dieu à y parvenir toujours mieux. Nous ne pourrons jamais nous contenter de vivre dans la « moyenneté. » Dans un autre de ses écrits, l’Apocalypse, que nous avons médité dans les semaines qui précédaient notre entrée en Avent, St Jean disait que les tièdes, les moyens, le Seigneur les vomissait. Les pécheurs, il les aime et il s’en occupe, mais ceux qui restent installés dans la tiédeur et la moyenneté, le Seigneur les vomit ! C’est à dire que ceux qui reconnaissent humblement qu’ils n’arrivent pas à vivre aussi bien qu’ils le voudraient la foi qu’ils professent, le Seigneur les aime et s’en occupe. 

Mais, ceux qui ont renoncé à leur idéal, qui sont satisfaits d’être moyens et qui demandent au Seigneur de se satisfaire de leur moyenneté, ceux qui cachent leur tiédeur derrière de beaux Seigneur, Seigneur professés devant les autres pour que personne ne se rende compte de rien, eux, le Seigneur les vomit. C’est l’une des grandes leçons de cette première lettre de St Jean qui se résume dans la célèbre formule que nous connaissons tous : « Celui qui prétend aimer Dieu qu’il ne voit pas et qui n’aime pas son frère qu’il voit est un menteur. » Voilà donc pour la présentation générale de cette première lettre de St Jean.

Maintenant, dans le texte que nous venons d’entendre, Jean va parler d’une autre catégorie de menteurs. Il ne s’agit plus de ceux qui ne font pas accorder leur foi et leur vie, mais il s’agit de ceux qui n’ont pas une foi juste et qui sont victimes ou partisans d’une hérésie très répandue à cette époque : le docétisme. En grec, dokein, ça signifie, sembler, paraître ou si vous voulez plus simplement : faire semblant. Eh bien, il y avait tout un courant dans le christianisme naissant qui prétendait que Jésus n’avait pas été vraiment un homme, il avait juste fait semblant d’être un homme. Il faisait semblant d’avoir soif au puits de la samaritaine, d’avoir de la tristesse devant le tombeau de Lazare, de souffrir dans sa passion. Il faisait semblant parce qu’il n’était pas vraiment homme, il était comme tombé du ciel et avait pris les apparences d’un homme, mais c’est tout. Nous, ça peut nous sembler étonnant comme position, mais il a fallu se battre contre cette hérésie qui attirait tellement. 

Pour le comprendre, il faut se rappeler l’impact qu’a pu avoir le courant philosophique issu de la réflexion de Platon. Ce courant de pensée n’accordait de l’importance qu’à l’esprit, il considérait en faisant ce fameux jeu de mots sur deux termes grecs que le corps était une véritable prison pour l’âme. Dans ce contexte, on comprend qu’il était difficile de croire en l’Incarnation : que Dieu qui est pur esprit ait voulu prendre un corps, enfermer son esprit si puissant dans la prison d’un corps, ça semblait pure folie. Oui, de fait, c’était bien une folie, mais Dieu est fou, il est fou d’amour pour nous et pour nous sauver, il a accepté de faire ce qui est complètement fou : de prendre un corps.

La vérité de l’Incarnation que nous avons méditée ces jours est liée à la vérité du Salut. Pour le démontrer, je pourrais commenter longuement la formule savante de St Grégoire de Naziance que nous fêtons aujourd’hui et qui disait : ce qui n’est pas assumé n’est pas sauvé, formule qui sera reprise par tous les grands théologiens, notamment St Thomas d’Aquin. Mais il est sûrement préférable de rester simple en disant qu’on n’aime pas les autres quand on fait semblant ! Semblant d’être proche d’eux, semblant de partager leur vie. Quand on aime vraiment, on se donne totalement, en vérité. C’est ce qu’a fait Dieu en Jésus-Christ.

Alors, St Jean, dans sa 1° lettre aura des formules très fortes pour insister sur le réalisme de l’Incarnation, c’est d’ailleurs pour cela que nous lisons cette lettre dans le temps de Noël et il aura aussi des formules très sévères contre ceux qui refusent ce réalisme. Nous l’avons entendu, il les traite d’anti-Christ. Dans la lecture d’aujourd’hui, ce qui est très beau, c’est cette affirmation de St Jean qui nous rassure : ceux qui se laissent conduire par l’Esprit-Saint ne seront jamais dans l’erreur. Ni dans l’erreur sur le contenu de la foi, ni dans l’erreur quant à la manière de se comporter. Car c’est bien de l’Esprit-Saint dont parle St Jean en utilisant le mot « onction », dans le Veni Creator, c’est l’un des mots qui sert à désigner le St Esprit.

Je relis les paroles de St Jean que nous avons entendues, avec tout ce que j’ai dit, elles pourront prendre une saveur nouvelle : « Quant à vous, l’onction que vous avez reçue de lui demeure en vous, et vous n’avez pas besoin d’enseignement. Cette onction vous enseigne toutes choses, elle qui est vérité et non pas mensonge ; et, selon ce qu’elle vous a enseigné, vous demeurez en lui. » Pour professer une foi juste et, pour que cette profession de foi juste, nous donne un comportement juste, laissons-nous donc habiter par l’Esprit-Saint, renouvelons chaque matin notre désir de nous laisser habiter par le St Esprit. C’est aussi ce que nous demandons en priant la consécration.

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