26 septembre : 26° dimanche ordinaire. La jalousie est un vilain défaut … sauf chez Dieu !

Vous avez sûrement entendu parler de ces deux bandes de rappeurs qui se sont affrontées, cet été dans un aéroport parisien avec une violence inouïe. C’est quand même terrible quand on y réfléchit parce qu’ils faisaient la même chose, ils étaient habités par la même passion, alors pourquoi se sont-ils tapés dessus ? Et c’est la même chose chaque week-end, ou presque, sur bien des terrains de foot. J’en sais quelque chose, moi qui ai été pendant plus de 10 ans arbitre officiel de foot.

L’explication pour comprendre cette violence dont usent ces personnes qui sont habitées par la même passion, il me semble qu’elle est assez simple, j’allais dire enfantine, c’est la jalousie. La jalousie, ce mal qui dévore les enfants qui veulent toujours le jouet que l’autre enfant est en train d’utiliser, qui veulent toujours être sur les genoux de papa ou maman quand le petit frère ou la petite sœur y sont … Oui, la jalousie est un mal qui dévore les enfants, mais dont, hélas, on ne guérit pas toujours facilement en grandissant et qui continue à faire des ravages dans les couples ou dans les entreprises et même dans les loisirs.

Je pense que vous voyez tout de suite le rapport entre ce que je viens de dire et les textes que nous avons lus.

  • Dans la 1° lecture, il est question de jalousie. Ce texte, je l’aime beaucoup, je l’avais d’ailleurs choisi pour mon ordination diaconale. Moïse est débordé, sur la suggestion de son beau-père, il demande que Dieu lui donne des adjoints pour le seconder. Dieu accepte et lui demande de choisir 70 anciens sur qui il répandra une part de l’Esprit qui repose sur Moïse. Mais, voilà, le jour de la cérémonie, il en manque deux, Eldad et Medad, où étaient-ils, nous n’en savons rien. Toujours est-il que, comme ils avaient été choisis, même absents à la cérémonie d’investiture, ils ont reçu le Saint Esprit pour pouvoir remplir la mission qui leur sera confiée. Ceux qui avaient fait l’effort d’être là, à l’heure, sont fous de rage : ce n’est pas normal, ils n’étaient pas là, ils n’auraient pas dû recevoir le Saint Esprit et ils le font savoir à Moïse qui a cette belle réponse : « Serais-tu jaloux pour moi ? Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ! Si le Seigneur pouvait mettre son esprit sur eux tous ! » Pourquoi devenir jaloux de ceux qui vont devenir aptes à faire du bien ? Il serait bien plus préférable de souhaiter que tout le monde puisse faire du bien !
  • Dans l’évangile, c’est la même scène qui se rejoue, avec les mêmes réactions de jalousie. Les apôtres ont vu quelqu’un qui faisait du bien, mais il n’appartenait pas au groupe des apôtres, alors ils l’ont empêché de continuer. Ils sont jaloux, eux aussi, le bien, ils pensent qu’il n’y a qu’eux qui peuvent le faire ! Et Jésus va répondre à la manière de Moïse : n’empêchez personne de faire du bien, réjouissez-vous plutôt du bien qui se fait, d’où qu’il vienne !

C’est vraiment terrible la jalousie parce que, soit dans les exemples de la Bible, soit dans les exemples que j’ai donnés, la jalousie est toujours déclenchée par du bien. C’est parce que quelqu’un fait du bien, fait très bien quelque chose que je deviens jaloux. La jalousie, elle fait beaucoup de mal, alors qu’elle est déclenchée par du bien ! Le bien, la jalousie, elle le transforme en mal, quel gâchis !

Le bien nous tourne vers les autres, la jalousie, elle nous tourne sur nous-mêmes. Quelqu’un joue très bien au foot, au lieu d’admirer son jeu, les buts qu’il marque, je me compare et je ne suis pas heureux parce que je ne suis pas le meilleur ! Dans ce cas, nous le voyons bien, c’est moi qui compte, pas le foot ! 

Une personne joue très bien de la flûte, au lieu de profiter de la merveilleuse musique qu’elle m’offre, je me compare et je ne suis pas heureux parce qu’elle est la meilleure. Encore une fois, ce n’est plus la musique qui compte, c’est moi. La jalousie me tourne sur moi-même, elle me rend auto-référencé selon l’expression que le pape François aime utiliser. La jalousie m’empêche de me réjouir de ce qui est bien quand je ne suis pas à l’origine de ce bien. Je viens de donner des exemples tirés du foot et de la musique, mais, hélas, la jalousie peut s’infiltrer partout et distiller son venin mortel, elle peut même se retrouver dans les communautés chrétiennes et les communautés religieuses, restons donc très vigilants !

Pour Jésus, on le voit bien, ce qui compte, c’est le bien, pas d’abord ceux qui le font. Pour Jésus, la vie n’est pas un championnat où il faudrait être le meilleur pour que tout le monde nous admire. Pour Jésus, l’essentiel c’est que l’amour se diffuse dans monde et que personne n’en soit privé, pour cela, il faut que chacun fasse beaucoup de bien et peu importe ceux qui le font, à quelle religion ils appartiennent. Oui, mais quand je dis ça, immédiatement une question peut surgir : mais est-ce que ça vaut encore le coup d’être chrétien si l’essentiel, c’est de faire du bien ? Parce qu’il y a quand même des contraintes quand on est chrétien : il faut se lever le dimanche matin pour aller à la messe, il faut renoncer à certaines activités pour aller au caté ? A quoi ça sert puisque l’essentiel, c’est de faire du bien et qu’on peut faire beaucoup de bien sans être chrétien !

Évidemment, vous vous en doutez, je suis persuadé que ça vaut le coup d’être chrétien et que c’est même très important. Parce que, voyez-vous, ceux qui ne sont pas chrétiens ou disons simplement croyants, pour faire le bien, ils ne peuvent compter que sur leurs forces. Pour faire le bien, ils doivent plonger dans leurs ressources personnelles, bien sûr, ils sont aussi aidés et entrainés par les autres, mais les autres, ils sont comme eux, ils ne peuvent compter que sur leurs ressources personnelles. Or, je ne sais pas vous, mais moi, il y a des moments, il y a des jours où j’ai la sensation d’être vidé, il n’y a plus grand-chose en moi … alors, si, ces jours-là, je ne peux compter que sur les ressources pour faire du bien, je ne vais pas en faire beaucoup !

Le chrétien, ce qui le différencie des autres, ce n’est pas qu’il serait meilleur que les autres, sûrement pas, mais, lui, il sait où puiser la force de faire du bien. Et c’est pour cela que nous venons à la messe, comme chrétiens, nous savons qu’à notre Baptême, une source d’amour a été ouverte en nos cœurs. Alors bien sûr, il arrive que cette source soit un peu ensablée, qu’elle coule moins fort parce que nous l’avons laissée se recouvrir de médiocrités, mais la source sera toujours là. Et, quand nous nous rendons compte qu’elle coule moins fort, pour qu’elle reparte, il suffit que nous allions demander le pardon du Seigneur, cette opération par laquelle, il vient désensabler la source, lui enlever toutes les médiocrités qui l’empêchent de donner l’amour à plein rendement. 

Je conclus en répondant à une question que vous vous êtes peut-être posée en écoutant mon développement sur la jalousie : si la jalousie est si terrible, pourquoi la Bible dit-elle que Dieu est jaloux ? Il faut bien comprendre le sens de cette expression. Quand on se retrrouve face à une expression compliquée, il faut toujours chercher l’explication en posant la question suivante : que signifie la jalousie chez Quelqu’un qui n’est qu’Amour, ce qui est le cas pour Dieu et Dieu seul. Nous l’avons compris, la jalousie, en matière d’amour est liée à la passion. Chez l’homme ou la femme, la jalousie va être l’expression d’une faiblesse : ils craignent qu’un (ou une) qui soit meilleur qu’eux ne vienne enlever le ou la bien-aimée. 

Le jaloux craint pour lui de se retrouver seul. Alors que la jalousie de Dieu exprime exactement l’inverse ! Dieu ne craint pas pour lui, mais pour nous ; il ne craint pas parce qu’il serait faible sans nous, mais il craint car il connait notre faiblesse sans Lui. Du coup, nous comprenons que la jalousie de Dieu devient l’une des plus hautes formes de son amour. C’est cet amour qu’il nous offre sans cesse et maintenant de manière particulière.

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