26 septembre : lundi 26° semaine ordinaire. Quand nous nous découvrons frère (soeur) quasi-jumeau de Job !

Homélie de la 1° messe de cette semaine de retraite que je prêche sur le thème : Viens Esprit-Saint, renouvelle-moi en profondeur !

C’est le livre de Job qui va nous accompagner tout au long de cette semaine dans les premières lectures. Ce livre, finalement, n’est pas très facile à lire, le plus facile, c’est sans doute la lecture d’aujourd’hui ! Il n’est pas facile à lire car il est composé de 2 styles très différents. L’introduction dont nous avons entendu un large extrait aujourd’hui et la conclusion sont écrits en prose et tout le corps du livre, c’est-à-dire 41 chapitres ont été écrits en vers. En plus, les procédés de versification ne sont pas les nôtres et cela rend la traduction assez difficile, ce n’est pas aisé de faire percevoir au lecteur d’aujourd’hui le mouvement et la subtilité du texte. C’est dommage parce que c’est l’un des livres dont le message est le plus actuel puisqu’il traite de l’injuste souffrance infligée au juste. 

Encore une précision, le livre de Job n’est pas un livre historique. Job n’a pas existé ou plutôt il existe des milliards de Job ! Marie Noëlle Thabut qui commente avec brio les textes de chaque dimanche sur le site de la Conférence des Evêques de France a écrit, à propos de Job, un très bon petit livre au titre évocateur : « Qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu ? » C’est souvent ce que disent les gens quand des tuiles leur tombent dessus de manière incompréhensible et injuste. Le livre de Job, c’est donc la réflexion d’un croyant audacieux qui se tourne vers Dieu pour lui demander des comptes puisqu’il se retrouve accablé de manière si injuste par tant de souffrances. Bien des personnes traversant des épreuves pourraient reprendre telles quelles, sans changer un seul mot, certaines réflexions, certains cris de révolte de Job.

Aujourd’hui, nous avons entendu le début du livre qui commence comme un conte. Nous n’avons pas lu les tout premiers versets du livre, c’est dommage, car c’est vraiment le style du conte de fées : il était une fois, un homme, Job, intègre et droit, qui craignait Dieu et qui s’écartait du mal. Bref, Job est un modèle et tout lui réussissait. Nous n’avons pas lu non plus le verset qui faisait l’inventaire de sa fortune : Il avait un troupeau de sept mille brebis, trois mille chameaux, cinq cents paires de bœufs, cinq cents ânesses, et il possédait un grand nombre de serviteurs. Cet homme était le plus riche de tous les fils de l’Orient. Cet homme faisait l’admiration de Dieu qui aimait le donner en exemple.

Mais dans la cour céleste, il y avait un triste personnage, le Satan, c’est-à-dire l’Adversaire. De qui était-il l’adversaire ? De tout le monde, c’est-à-dire de Dieu et des hommes. Le Satan en a eu marre d’entendre les louanges de Dieu à propos de Job et il a expliqué que ce n’était pas compliqué d’être bon, avec Dieu et avec les hommes, quand tout vous réussit. Il a donc demandé la permission d’éprouver Job pour voir comment il réagirait. Dieu a permis à condition que la vie de Job ne soit pas menacée. Entre parenthèse, je fais tout de suite remarquer que les épreuves ne viennent pas de Dieu, c’est le Satan qui en a eu l’idée. Tous, à un moment ou à un autre de notre vie, nous sommes confrontés aux épreuveset le livre de Job est clair, ces épreuves, elles ne viennent jamais de Dieu. Vous allez me dire, oui, mais il les permet. C’est un grand mystère et une semaine de méditation sur le livre de Job ne sera pas de trop pour avoir quelques idées + claires sur ce sujet si compliqué. 

Je tiens tout de suite à bien préciser que nous ne trouverons pas dans le livre de Job la solution au problème du mal, c’est la plus grande énigme à laquelle nous puissions être confrontés. Comment tenir en même temps que Dieu est bon, qu’il a tout créé par amour et donc que tout ce qu’il a créé est bon et qu’en même temps le mal puisse exister, un mal qui semble s’acharner sur certains. Les nombreuses confidences recueillies dans l’accompagnement des retraitants me font encore plus mesurer combien cette question est douloureuse et insoluble. On pourrait se dire : si le livre ne donne pas de réponse, à quoi bon le lire ? Je crois, en fait que ce livre a deux grandes vertus :

– 1° vertu : s’il ne donne pas de réponse, il combat les mauvaises réponses qui sont souvent avancées face au problème du mal et ce n’est pas rien. C’est ce qui transparait dans les longues discussions de Job avec ses 3 amis, discussions qu’hélas nous ne lirons pas.

– 2° vertu : si le livre ne donne pas de réponse, il aide à trouver l’attitude la plus juste possible quand nous sommes confrontés au mal. Et cela transparait dans les discussions de Job avec sa femme que nous ne lirons pas non plus ou dans les discussions avec Dieu que nous lirons.

Aujourd’hui, dans la lecture, nous avons entendu le drame se nouer. Après l’intervention du Satan et l’autorisation de Dieu, les catastrophes vont s’enchainer. Et, ce qui nous parait étonnant, c’est que Job reste stoïque, prononçant cette parole à la limite du choquant tellement elle nous parait décalée : « Nu je suis sorti du ventre de ma mère, nu j’y retournerai. Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris : Que le nom du Seigneur soit béni ! » Quand on entend ça, on a vite envie de dire : « Eh bien moi, je n’en suis pas là ! Je ne me vois pas dire quelque chose comme ça après une série de catastrophes qui s’abattraient sur moi ! » Rassurez-vous, ces paroles, je ne suis pas sûr qu’elles soient une profession de foi. Je pense plutôt que Job est complètement sonné, on appelle cela, aujourd’hui, un état de sidération. Et dans ces moments-là, on dit ce qui nous traverse l’esprit. Job était imprégné de sa foi, ce sont donc des mots du langage de la foi qu’il prononce, mais sans doute, qu’il n’habite pas vraiment les mots qu’il prononce. La lecture de demain, nous le montrera très bien puisque nous serons témoins de son entrée en révolte, nous l’entendrons maudire le jour de sa naissance. Ouf, Job est bien comme nous, tant mieux ! Ça veut donc dire que ce livre n’a pas été écrit pour des extra-terrestres de la foi ! Nous risquons bien, en de nombreux passages, d’avoir l’impression que ce livre parle de nous, répercute nos pensées, nos mots. C’est donc un très beau programme qui s’ouvre devant nous cette semaine avec la lecture de ce livre.

Maintenant, il faut quand même que je dise quelques mots sur l’Evangile. Cet Evangile, il comporte deux parties. La première partie est la réponse de Jésus aux apôtres qui se chamaillaient pour savoir qui était le plus grand parmi eux. Et la deuxième partie est encore une réponse de Jésus, mais cette fois, il répond à cette crise de jalousie des apôtres qui se rendent compte que des gens qui ne font pas partie de leur groupe sont aussi capables de faire du bien. Regardons ces deux réponses.

Tout d’abord, arrêtons-nous sur la réponse de Jésus à la chamaillerie des apôtres. Cette discussion pour savoir qui était le plus grand reviendra plusieurs fois dans les Evangiles. Luc nous dira même que les apôtres se sont encore chamaillés à ce sujet au cours du dernier repas de Jésus. Vous vous rendez compte, en plein cœur de l’institution de l’Eucharistie, après que Jésus leur ait lavé les pieds, quand il livre sa vie, ils se demandent encore qui est le plus grand ! C’est terrible ! Ici, c’est un autre contexte et la réponse de Jésus est très belle, il prend un enfant et le place au milieu des apôtres en leur disant : Celui qui accueille en mon nom cet enfant, il m’accueille, moi. Et celui qui m’accueille accueille celui qui m’a envoyé. En effet, le plus petit d’entre vous tous, c’est celui-là qui est grand. Il répondra souvent à ces chamailleries en montrant un enfant et en le donnant comme exemple. Pourquoi ? Ce n’est pas parce que l’enfant serait pur. Non, un enfant, même petit, quand il a décidé de pourrir la nuit de ses parents, il sait faire ! L’enfant, c’est le signe de la confiance. Il sait qu’il n’a pas à se faire de souci car ses parents et ceux qui l’aiment s’occuperont de lui. C’est pour cela que c’est si grave d’abuser d’un enfant, on casse définitivement cette confiance qui est sa caractéristique première. Jésus nous dit donc comme il le disait à ses apôtres : vous serez vraiment grands quand vous accepterez de vous faire petits pour mieux vous tenir dans la confiance. Là, de grandes choses pourront se réaliser en vous et à travers vous puisque vous laisserez le Père du ciel donner toute sa mesure. Demandons cette grâce, tout au long de cette retraite, de nous faire petits pour mieux nous tenir dans la confiance, pour mieux nous laisser faire.

Enfin, dans la 2° partie, Jésus répond à la jalousie des apôtres qui ne comprennent pas comment du bien peut se faire en dehors d’eux. Au lieu de se réjouir que du bien puisse se faire, eux, ce qu’ils voient, c’est que ce bien se fait en dehors d’eux, quelle étroitesse d’esprit ! Oui, c’est bien étroit, mais ça peut nous arriver de tomber dans une telle étroitesse quand nous n’arrivons pas à nous réjouir que d’autres puissent mieux réussir que nous. Quand nous avons cette mentalité de douanier que ne cesse de dénoncer le pape, c’est-à-dire la mentalité de ceux qui veulent tout contrôler parce que rien ne doit leur échapper puisqu’ils réussissent forcément mieux que les autres. L’Esprit-Saint sur lequel nous méditons cette semaine est celui dont nous ne pouvons connaître d’où vient son souffle et où il va, c’est ce que Jésus dit à Nicodème. Il est l’Esprit de liberté qui souffle où il veut, chez tous ceux qu’on appelle les hommes de bonne volonté. Ne lui mettons surtout pas de limites ! 

Cette publication a un commentaire

  1. Adéline

    Amen ! Merci pour votre retour reçu hier, cher P. Hébert.

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