30 septembre : vendredi 26° semaine

Nous retrouvons notre frère Job qui, comme je vous l’annonçais, a fini de vider son sac et va donc enfin laisser Dieu parler. Oui parce que, jusqu’à maintenant, le principal accusé n’a pas pu s’exprimer. Nous avons entendu rapidement le Satan, nous avons longuement entendu Job, le plaignant, nous ne les avons pas entendus, mais nous savons que les amis de Job qui se sont transformés en avocats de la défense ont, eux aussi, beaucoup parlé. Mais, l’accusé, lui, est resté silencieux mis à part quelques mots au début pour vanter le comportement de Job et pour interdire au Satan de toucher à sa vie. Tout le monde semblait pressé de parler, il n’y en a qu’un qui aura attendu que ce soit le bon moment pour parler, c’est Dieu. De fait, pour qu’il puisse parler, il fallait que les autres se taisent et il a voulu donner à chacun la possibilité de dire tout ce qu’il avait à dire. 

Le verset d’introduction nous dit : Le Seigneur s’adressa à Job du milieu de la tempête. Si Dieu a différé sa prise de parole, ce n’était parce qu’il voulait attendre que ça se calme. Non, il accepte bien de parler au milieu de la tempête même si ce n’est jamais très aisé, mais Dieu ne se défile pas. Et, comme je le disais, mercredi, Dieu va intervenir calmement, comme devrait intervenir le père d’un ado en crise qui lui adresse tant de reproches. Dieu ne se lance pas dans un combat de boxe en disant à Job, maintenant que tu m’as bien reproché tout ce qui ne te convenait pas dans mon comportement, mes décisions à ton égard, c’est à mon tour de te reprocher tout ce qui ne me convient pas dans ton comportement ! Non, Dieu n’agit pas ainsi. Il dit en substance à Job : tu me reproches beaucoup de choses et finalement, j’en conclus que tu me juges incompétent pour mener les affaires du monde, eh bien, je vais te montrer que je ne sui pas si incompétent que ça ! Je ne vais pas t’accabler, mais je vais me justifier, rétablir la vérité.

Nous pouvons déjà comprendre que ce que Dieu va dire à Job, il le dit aussi pour nous. Parce que, tous, à un moment ou à un autre, il nous est arrivé de reprocher à Dieu de s’y prendre bien mal avec nous, avec nos connaissances, avec l’Eglise, avec le monde. D’abord, quand nous faisons ce genre de reproche à Dieu, nous avons très souvent une fausse image de lui. Nous l’imaginons, tel un marionnettiste, tirer les ficelles qui décident de notre destin, du destin de ceux que nous aimons. Mais nous ne sommes pas des marionnettes ! Le scénario de notre vie, Dieu ne l’a pas écrit dans le ciel en nous donnant quelques indices au fur et à mesure pour que nous le mettions en œuvre. Non ! Ça, c’est une vision païenne, en nous créant, Dieu nous a donné la capacité de poser des choix libres et ce sont ces choix que nous posons qui  écrivent notre vie. OK me direz-vous pour les choix que nous posons, nous sommes d’accord, c’est nous qui écrivons notre vie, mais il y a aussi beaucoup de choses qui s’imposent à nous, que nous ne décidons pas. C’est vrai, mais dans ce qui s’impose à nous, il y a des choses qui viennent de décisions prises par d’autres et Dieu n’y est pour rien. J’ai un accident de voiture parce que le chauffeur d’en face téléphonait et n’était pas attentif. Ce n’est ni Dieu, ni le destin, ni je ne sais quoi, c’est un choix tordu de la personne d’en face qui pourra avoir de lourdes conséquences sur ma vie.

Reste le mal inexplicable, mais finalement, quand on y réfléchit bien, il n’y en a pas tant que ça. Les tempêtes qui font tant de dégâts et qui se multiplient sont les conséquences du dérèglement climatique et d’une urbanisation galopante qui n’a pas toujours respecté les règles de bon sens. Mais il y a quand même un mal inexplicable qui reste : la naissance d’un enfant lourdement handicapé alors qu’aucun risque n’a été pris avant ou pendant la grossesse, la survenue d’une maladie orpheline et sans doute de nombreuses autres situations. C’est pour répondre à sa mise en accusation dans ces circonstances d’un mal inexplicable que Dieu prend la parole. Et, bien évidemment, il plaide non-coupable. Les 4 chapitres, de 38 à 41, dans lesquels Dieu parle sont extrêmement beaux, ils sont comme une grande hymne à la nature, à la vie. Si vous avez le temps, lisez-les, c’est tellement beau. C’est le moyen pour Dieu de montrer à Job tout ce qu’il a fait et bien fait. C’est donc un appel à l’humilité que lance Dieu : où étais-tu quand j’ai fait tout ça ? Serais-tu capable de faire mieux puisque tu me reproches de m’y être mal pris ? 

Avant que Dieu n’ait fini, Job est tout penaud, nous l’avons entendu : Moi qui suis si peu de chose, que pourrais-je te répliquer ? Je mets la main sur ma bouche. J’ai parlé une fois, je ne répondrai plus ; deux fois, je n’ajouterai plus rien. Demain, nous l’entendrons dire des paroles encore plus fortes pour demander pardon à Dieu de sa présomption. Job comprendra qu’avec Dieu, il s’y est très mal pris et nous pouvons retenir la leçon quand nous aussi, nous sommes en pétard contre Dieu. Job comprend qu’il a accusé Dieu de ce dont il n’est pas responsable, qu’il a demandé à Dieu ce qu’il ne pouvait pas lui donner et que, hélas, il ne lui a pas demandé ce qu’il aurait tant aimé lui donner. Oui, Job a demandé à Dieu que ses misères s’arrêtent, mais il le lui a demandé en croyant que Dieu en était responsable, parce qu’il estimait que Dieu était responsable. En entendant la plaidoirie de Dieu, Job comprend qu’il n’y est pour rien car Dieu a tout bien fait ce qu’il a fait. Alors Job comprend que tout ce qu’il peut demander à Dieu, c’est son soutien pour l’épauler dans les épreuves, ça oui, il veut et il peut le donner.

Des siècles plus tard, Jésus dira : Vous tous qui n’en pouvez plus, venez à moi ! Jésus n’a pas dit qu’il supprimerait ce qui nous fatiguait comme s’il en avait le pouvoir, comme si c’était lui qui avait chargé nos épaules de poids trop lourds ! Jésus dira : vous trouverez le repos si vous prenez mon joug. Or le joug, c’est cette pièce de bois qui permet d’atteler deux bœufs pour qu’ils puissent labourer ensemble. Un seul bœuf s’épuiserait à la tâche, mais à deux, reliés par un joug, c’est possible. Voilà ce que Jésus nous dit : quand tu n’en peux plus, ne me demande pas d’arrêter ce qui te fait souffrir, je ne suis pas un magicien ni un marionnettiste, prends-moi plutôt à tes côtés, sois uni à moi comme un bœuf sera uni à un autre bœuf par un joug. Et c’est très beau car certains Pères de l’Eglise, relisant ce passage, diront que le joug qui nous unit à Jésus, c’est l’Esprit-Saint, nous voilà reliés au thème de cette retraite. Croire en la puissance du Saint-Esprit, ça ne va pas nous donner une baguette magique qui fera disparaitre nos problèmes, non ! Croire en la puissance du Saint-Esprit, ça nous permettra de décider de ne plus affronter les épreuves de la vie en restant seul. Merci frère Job de nous avoir aidé à faire tout ce chemin, un chemin qui n’est pas fini puisque nous ne te quitterons que demain !

Je termine juste en disant quelques mots de l’Evangile.

Corazine et Bethsaïde, Capharnaüm, ces 3 villes, Jésus les déclare malheureuses. Quand, en tête d’un passage d’Evangile, il y a ces mots « malheur ou malheureux », prononcés par Jésus, parfois, on trouve dans les anciennes bibles, comme titre de ces passages, « Malédictions », quelle horreur ! Comme si Jésus était venu pour maudire ! Jésus ne sait rien faire d’autre que bénir. Bénédiction, ça vient du latin bene-dicere = dire du bien. Jésus a toujours dit du bien, réveillé le bien chez ceux qui venaient à lui, même quand il s’agissait des pires crapules comme Zachée. Quand nous retombons dans le péché, quand tout semble partir en eau de boudin dans nos vies, nous ne risquons rien à aller vers Jésus car lui, nous accueillera en nous bénissant, en réveillant le bien en nos cœurs, il ne sait faire que cela !

Si Jésus dit que Corazine, Bethsaïde et Capharnaüm sont malheureuses, c’est plutôt une manifestation de compassion. Les mots « malheur ou malheureux » utilisés comme ça en début de phrase pour désigner la situation d’une ou plusieurs personnes en grande difficulté est la reprise du mot que ne cessaient de répéter les pleureuses qui tournaient autour du corps d’un mort. En désignant ces villes comme malheureuses, Jésus ne les condamne pas, il pleure sur elles parce qu’elles sont comme déjà mortes. Quand Jésus dira malheureux, vous les riches, il ne les condamne pas, il pleure sur eux parce que leurs choix de vie ne peuvent les conduire à la vie. Dans les derniers moments de sa vie, Jésus pleurera sur Jérusalem regrettant qu’elle n’ait pas su accueillir celui qui était venu la visiter de la part de Dieu. Mes amis, au cours de cette semaine, nous pouvons en être sûrs, nous n’avons pas fait pleurer Jésus puisque nous avons eu soif d’être visités. Et si jamais il s’en trouvait encore un ou une qui résiste, la retraite n’est pas finie, il y a encore cette messe, cette après-midi, les deux belles célébrations en fin d’après-midi et en soirée et demain matin.

Cet article a 2 commentaires

  1. Adéline

    Amen ! Belle fin de session aux retraitants et à vous!

  2. NGENDAKURIYO

    Merci cher père pour cette homélie.Soyez bénis.

Laisser un commentaire