Vous avez reconnu dans la 1° lecture, la problématique que j’évoquais samedi dans ma présentation de la 1° lettre de St Jean quand je vous expliquais que les chrétiens de cette fin du 1° siècle ont été confrontés à une terrible hérésie : le docétisme. Du coup, on comprend que St Jean, parlant du discernement nécessaire qu’il faut opérer face à ce qu’on entend donne un critère important : « Voici comment vous reconnaîtrez l’Esprit de Dieu : tout esprit qui proclame que Jésus Christ est venu dans la chair, celui-là est de Dieu. Tout esprit qui refuse de proclamer Jésus, celui-là n’est pas de Dieu : c’est l’esprit de l’anti-Christ. » Voilà c’est donc clair, ceux qui refusent de reconnaître le réalisme de l’Incarnation ne peuvent pas parler en prétendant être inspirés par l’Esprit de Dieu : tout esprit qui proclame que Jésus Christ est venu dans la chair, celui-là est de Dieu.
Et, pour que ce soit très clair, St Jean le reprend en le formulant autrement : Tout esprit qui refuse de proclamer Jésus, celui-là n’est pas de Dieu. Quand St Jean utilise l’expression « proclamer Jésus » il veut bien parler de l’Incarnation, Jésus, c’est le nom d’homme de Celui qui est la 2° personne de la Trinité. A chaque fois que je proclame le nom de Jésus, c’est comme une mini profession de foi : je proclame que Dieu a envoyé son Fils éternel pour me sauver. Je proclame que, pour moi, il s’est fait homme, afin que moi, pauvre homme pécheur, je devienne fils de Dieu ! On se moque parfois des charismatiques qui aiment répéter sans cesse Jésus, Jésus, Jésus … mais on serait bien inspiré de les imiter puisque, comme je viens de le dire, prononcer ce simple mot, c’est faire une vraie profession de Foi.
Dans cette lecture, St Jean invite donc les chrétiens d’hier mais ceux d’aujourd’hui également au discernement. Il y a tellement de choses qui se disent qu’il ne faut pas tout avaler et rester prudent : « ne vous fiez pas à n’importe quelle inspiration, mais examinez les esprits pour voir s’ils sont de Dieu, car beaucoup de faux prophètes se sont répandus dans le monde. » Autrement dit, il y en a beaucoup qui parlent et disent n’importe quoi. Il faut apprendre à discerner pour ne pas se laisser avoir par n’importe quel propos que j’entends sur la place du marché ou à la radio et à la télé, et il faut être encore plus prudent avec tout ce qui circule sur internet et qui peut s’avérer complètement faux, on appelle ça d’un mot anglais : les « fake-news » qui hélas se répandent plus vite que la vérité. Les mauvaises nouvelles, les fausses nouvelles se diffusent hélas bien plus vite que la bonne nouvelle, que la vérité de la bonne nouvelle qui est que, en envoyant son Fils éternel qui est venu partager notre chair, notre histoire, Dieu a tout mis en œuvre pour nous sauver. Le Fils de Dieu s’est fait homme pour que les hommes puissent devenir Fils de Dieu.
De même qu’il mettait en garde les chrétiens de la fin du 1° siècle contre tout ce qui risquait de les perturber et qui était finalement distillé par le père du Mensonge, l’anti-Christ, St jean nous met en garde nous aussi : « ne vous fiez pas à n’importe quelle inspiration, mais examinez les esprits pour voir s’ils sont de Dieu, car beaucoup de faux prophètes se sont répandus dans le monde. » Mais comment faire pour examiner les esprits, selon l’expression qu’il utilise ? C’est la fameuse question du discernement que nous avons abordé au cours de la retraite et je vous ai donné quelques repères venant de la grande tradition de l’Eglise, particulièrement de St Ignace de Loyola. Je n’y reviens pas, je pense que vous avez vos notes ! Mais je voudrais vous raconter cette histoire très simple qui nous donne de bons repères faciles à retenir. Peut-être vous ai-je déjà raconter cette histoire ? Si c’est le cas, çà fera une révision ! Elle concerne Socrate.
Socrate avait, dans la Grèce antique, une haute réputation de sagesse. Quelqu’un vint un jour le trouver et lui dit : « Sais-tu ce que je viens d’apprendre sur ton ami ? »
« Un instant, répondit Socrate. Avant que tu me racontes tout cela, j’aimerais te faire passer un test rapide. Ce que tu as à me dire, l’as-tu fait passer par les trois tamis ?
Mais oui, reprit Socrate, avant de raconter toutes sortes de choses sur les autres, il est bon de prendre le temps de filtrer ce que l’on aimerait dire. C’est ce que j’appelle le test des trois tamis.
Le premier tamis est celui de la VÉRITÉ. As-tu vérifié si ce que tu veux me raconter est VRAI ? » « Non, pas vraiment, je n’ai pas vu la chose moi-même, je l’ai seulement entendu dire. » « Très bien ! Tu ne sais donc pas si c’est la vérité.
Voyons maintenant, essayons de filtrer autrement, en utilisant un deuxième tamis, celui de la BONTÉ. Ce que tu veux m’apprendre sur mon ami, est-ce quelque chose de BON ? » « Ah non, au contraire ! J’ai entendu dire que ton ami avait très mal agi. » « Donc, continue Socrate, tu veux me raconter de mauvaises choses sur lui et tu n’es pas sûr qu’elles soient vraies. Ce n’est pas très prometteur !
Mais tu peux encore passer le test, car il reste un tamis : celui de l’UTILITÉ. Est-il UTILE que tu m’apprennes ce que mon ami aurait fait ? » « Utile ? Non, pas vraiment, je ne crois pas que ce soit utile. »
« Alors, conclut Socrate, si ce que tu as à me raconter n’est ni VRAI, ni BON, ni UTILE, pourquoi vouloir me le dire ? Je ne veux rien savoir. De ton côté, tu ferais mieux d’oublier tout cela. »
Voilà déjà un repère très important pour savoir si je veux continuer à prêter attention à ce qu’on me dit : Est-ce que c’est VRAI, BON, UTILE ? Si on faisait passer tout ce qu’on entend mais aussi tout ce qu’on dit par ces 3 tamis, on éviterait bien des problèmes, y compris dans une communauté !
Enfin, je souligne cette affirmation de foi tellement consolante : « Celui qui est en vous, est plus grand que celui qui est dans le monde. » L’Esprit-Saint est plus grand que l’esprit du monde, l’esprit de mensonge, l’esprit du mal. Oui, comme c’est consolant parce que, certaines fois, on pourrait s’inquiéter en se demandant si le Mensonge ne serait pas en train de l’emporter. Oui, le père du mensonge a ses adeptes dans le monde, c’est évident et il fait du mal, mais retenons que L’Esprit-Saint est plus grand que l’esprit du monde, l’esprit de mensonge, l’esprit du mal.
D’ailleurs vous aurez remarqué cette mention si consolante qui se trouvait au tout début de l’Evangile : « quand Jésus apprit l’arrestation de Jean le Baptiste, il se retira en Galilée. Il quitta Nazareth et vint habiter à Capharnaüm. » C’est quand Jean-Baptiste est arrêté que Jésus décide de commencer son ministère. Il avait attendu 30 ans, il aurait pu attendre encore un peu en se disant que ça chauffait pour les prophètes et qu’il risquait gros en commençant son ministère maintenant. Mais non, il est précisément venu pour combattre l’esprit du mal et quand Jean-Baptiste est arrêté, il se dit que ça a assez duré, qu’il a fait suffisamment de mal comme ça, il décide donc d’aller l’affronter directement. Il s’appelle Jésus, c’est-à-dire Dieu sauve, il est l’Emmanuel, Dieu avec nous, eh bien il va montrer que ce ne sont pas que des mots. En paraphrasant ce que disait St Jean, dans la 1° lecture, je dirai qu’il va montrer que Celui qui est avec nous est plus grand que celui qui est dans le monde. C’est notre foi, c’est notre assurance. Alors quand nous sentons aux prises avec un combat qui nous dépasse, appelons-le, puisqu’il s’appelle Jésus, c’est-à-dire Dieu sauve, puisqu’il est l’Emmanuel, Dieu avec nous, eh bien il va montrer, aujourd’hui encore, que ce ne sont pas que des mots !