5 juillet : mardi 13° semaine ordinaire Une miséricorde qui se révèle dans le temps Jésus dort dans la tempête, il faut le faire !

La lecture saucissonnée du livre de la Genèse ne nous a pas permis d’entendre les versets qui nous auraient aidé à de comprendre la situation évoquée au début de la lecture : les gens de Sodome avaient voulu s’en prendre aux deux voyageurs passant la nuit chez Loth. Mais l’évocation du seul nom de la ville de Sodome nous permet d’imaginer assez facilement les intentions des habitants à l’égard de ces deux voyageurs étrangers hébergés chez Loth … c’est la goutte qui va faire déborder le vase. C’est le projet sordide de trop qui va décider Dieu à détruire Sodome.

Alors, il faut bien le reconnaître, ce genre de texte nous laisse souvent mal à l’aise. Comment Dieu qui est amour peut-il avoir de tels projets. Certes, nous comprenons assez bien que Dieu ne puisse pas laisser le mal proliférer sans réagir, mais de là à détruire toute une ville avec tous ses habitants, comment le comprendre ? Pour essayer de le comprendre, il faut d’abord se référer au chapitre précédent, c’était la 1° lecture d’hier que nous n’avons pas pu entendre en raison de la fête de St Thomas. Dans ce texte bien connu, Abraham intercède en faveur de Sodome pour que Dieu, selon l’expression du texte, ne détruise pas les justes avec les coupables. Et Dieu avait promis que s’il trouvait 10 justes, il ne détruirait pas la ville. Alors, sans doute, n’a-t-il pas trouvé 10 justes dans cette ville pour avoir mis sa menace à exécution. Cela nous permet de mesurer l’ampleur du mal si terriblement enraciné dans le cœur des habitants de cette ville. Mais quand même, nous restons avec nos questions, si Dieu est amour, pourquoi a-t-il détruit ? Pourquoi n’a-t-il pas envoyé un émissaire chargé d’inviter à la conversion pour qu’il puisse faire miséricorde ?

Il me semble qu’on peut répondre de deux manières différentes à cette question.

– La 1° manière de répondre, c’est de réviser notre conception de la miséricorde de Dieu. Elle ne doit pas être envisagée comme un amour chamallow, Dieu n’est pas un édredon mou, sans consistance, je ne sais pas bien comment le dire, mais je pense que vous comprenez ce que je veux dire. Oui, Dieu est miséricorde, mais sa miséricorde ne le rend pas gâteux au point de tout accepter. C’est justement parce qu’il est miséricorde, que Dieu désire ardemment le bien, le bon, le vrai, bref c’est parce qu’il est miséricorde que Dieu veut que l’amour puisse triompher et cela nécessite impérativement une victoire sur le mal, sur le péché. Parce qu’il est miséricorde, Dieu annonce que le mal, que le péché, vont passer un mauvais quart d’heure !

– Et c’est là qu’il nous faut vite passer à la 2° manière de répondre à notre question. Ce texte est extrait du livre de la Genèse, c’est le 1° livre de la Bible, c’est-à-dire que nous n’en sommes qu’au début de la Révélation, de l’histoire du Salut. Puisque nous ne sommes qu’au début, il faut accepter qu’il y ait encore un long chemin à parcourir pour que le cœur miséricordieux du Seigneur soit pleinement révélé. Il faudra du temps pour découvrir que Dieu veut détruire le péché tout en sauvant le pécheur, il faudra que Jésus vienne et que, du haut de la croix, il implore la miséricorde pour ceux qui le font mourir.

Ainsi donc, quand nous lisons un texte du Premier Testament, soyons patients, tout en sachant recueillir et nous émerveiller de toutes ces perles de révélation qui nous font progresser vers la compréhension d’un Dieu dont l’amour si miséricordieux dépasse tout ce que nous n’osions même pas imaginer ou espérer.

Quant à l’Evangile, il nous présente l’une des versions de la tempête apaisée qu’on retrouvera dans les 3 Evangiles synoptiques, chacun ayant des particularités intéressantes. En lisant le texte, dans la version de St Matthieu, on pourrait retenir deux détails étonnants. Le 1°, c’est de voir que la tempête se déchaine contre cette barque alors que Jésus y est monté en premier. Le 2°, c’est que, pendant la tempête, Jésus dort. Reprenons chacun de ces deux détails.

1° détail : la tempête se déchaine contre cette barque alors que Matthieu insiste pour dire que Jésus y est monté en premier. Ce détail a dû profondément interroger les apôtres. Ils voient Jésus monter dans la barque, ils le suivent en toute confiance et voilà qu’ils se retrouvent confrontés à une tempête terrible comme il peut y en avoir sur ce lac, apparemment tranquille, mais qui cache bien son jeu, particulièrement quand le soleil se lève ou quand il se couche. 

Certes Jésus n’était expert ni en navigation, ni en météo, mais en le suivant, les apôtres pensaient être en sécurité, eh bien non ! Ils ont suivi Jésus, Jésus était là avec eux, et, malgré tout, la tempête est venue les déstabiliser. Vous sentez bien que si j’insiste tant, c’est parce que nous refaisons régulièrement cette même expérience : nous aussi, nous suivons Jésus, du moins nous essayons de le suivre, en répondant à un appel que nous avons ressenti et qui nous a conduits à dire oui à une vocation spécifique ou à nous engager dans le mariage. Et voilà que, dans cet état de vie que nous avons choisi pour répondre à l’appel du Seigneur, nous sommes confrontés à de terribles tempêtes, de terribles épreuves. Certaines de ces épreuves sont comme des conséquences de notre péché, de nos mauvais choix, de notre médiocrité accumulée. Attention, n’allez pas penser qu’il s’agirait d’une punition de Dieu, non ! C’est seulement la conséquence de nos mauvais choix parce que tous nos actes ont des conséquences. Nos actes mauvais ont donc des conséquences mauvaises et c’est ainsi que nous pouvons expliquer certaines tempêtes que nous traversons. Mais ce n’est pas le cas de toutes les épreuves, loin s’en faut ! 

Il y a des tempêtes que nous devons traverser et qui ne sont pas les conséquences de nos mauvais choix. Et pourtant, elles sont bien là, alors même que nous avons voulu être fidèles à l’appel du Seigneur. Votre prédicateur quand il a dit oui à l’appel de l’Eglise pour devenir évêque n’imaginait sans doute pas qu’il aurait à piloter la barre de deux diocèses successifs par si gros temps, ce qui a été le cas de tous les évêques qui ont eu à faire face à la crise des abus. Ils ont courageusement dit oui à l’appel de l’Eglise et, sans faute de leur part, la tempête s’est déchainée. Vous savez que les Foyers eux-mêmes ont subi et continuent de subir la tempête alors que ceux qui les composent et les dirigent aujourd’hui ont, eux aussi, courageusement dit oui à l’appel du Seigneur ; les tempêtes qu’ils doivent affronter aujourd’hui ne résultent pas de faute de leur part. Et puis, vous qui êtes là, vous avez aussi votre lot d’épreuves, de tempêtes que vous avez traversées ou que vous êtes en train de traverser et qui vous secouent profondément alors même que vous cherchez à rester fidèlement unis à Jésus.

Alors, il nous est bon de méditer ce texte qui nous permet de voir que, de tout temps, le fait de suivre Jésus n’a pas empêché les tempêtes de se déchainer. Ce qui nous arrive n’est pas nouveau, les premiers apôtres ont été confrontés aux mêmes réalités que nous et ils ont dû se poser les mêmes questions que nous, être autant déstabilisés que nous !

Parvenus à ce point de notre réflexion, il va être important de passer au 2° détail que j’évoquais : Pendant la tempête, Jésus dort. Ce détail me surprend toujours parce que j’ai eu l’occasion de faire quelques semaines de voiliers quand j’étais responsable de la Pastorale des jeunes. Une fois, nous avons essuyé une belle tempête, eh bien, je peux vous dire que j’avais envie de tout, sauf de dormir, si vous voyez ce que je veux dire ! Jésus, lui, il dort ! Cette tempête que nous avions essuyée avait duré suffisamment longtemps pour que j’ai le temps de m’interroger : de quoi as-tu peur, Roger ? Est-ce que tu as peur de mourir, si oui, pourquoi ? C’est important de pouvoir se poser de temps en temps cette question, surtout quand on est en situation compliquée ! Jésus, lui, il ne gambergeait pas, il dormait ! Or, vous savez comment on appelle le sommeil de quelqu’un qui dort profondément alors qu’il y aurait toutes les raisons de ne pas dormir ? C’est le sommeil du juste ! Ça peut nous donner à réfléchir ! 

Et le plus étonnant, c’est ce qu’il dit quand les apôtres, morts de trouille, finissent par le réveiller : « Pourquoi êtes- vous si craintifs, hommes de peu de foi ? » Jésus repère vite le problème essentiel, ce n’est pas la tempête, mais, dans la tempête, le manque de foi des apôtres. Ils avaient cru qu’en suivant Jésus, ils seraient épargnés, qu’ils ne connaitraient jamais de problèmes, jamais de tempêtes. Mais la foi, ce n’est pas cela ! Alors, pour conclure, je vous laisse avec cette définition, pleine d’humour que j’aime tant : la foi, c’est comme les essuie-glaces d’une voiture, ça n’empêche pas la pluie de tomber, mais ça permet d’avancer ! Autrement dit, ta foi ne te mettra pas à l’abri des épreuves, mais, dans les épreuves, ta foi te permettra de tenir et d’avancer : la foi, c’est comme les essuie-glaces d’une voiture, ça n’empêche pas la pluie de tomber, mais ça permet d’avancer !

Cette publication a un commentaire

  1. Jean Marc

    Cette homélie me fait penser à la prière de Charles de Foucauld
    Mon Père,

    Je m’abandonne à toi,
    fais de moi ce qu’il te plaira.

    Quoi que tu fasses de moi,
    je te remercie.

    Je suis prêt à tout, j’accepte tout.
    Pourvu que ta volonté
    se fasse en moi, en toutes tes créatures,
    je ne désire rien d’autre, mon Dieu.

    Je remets mon âme entre tes mains.
    Je te la donne, mon Dieu,
    avec tout l’amour de mon cœur,
    parce que je t’aime,
    et que ce m’est un besoin d’amour
    de me donner,
    de me remettre entre tes mains, sans mesure,
    avec une infinie confiance,
    car tu es mon Père.

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