7 juillet : jeudi 14° semaine temps ordinaire La miséricorde l’emporte sur la justice … Ne compter que sur Dieu : solo Dios basta !

La lecture d’Osée que nous avons entendue fait partie des pages que l’on peut faire lire à tous ceux qui pensent que la lecture du Premier Testament est inutile car elle ne nous apprend rien d’intéressant sur Dieu. Je me rappellerai toujours cette scène dont j’ai été témoin quand j’étais séminariste. Un homme est sollicité par son curé pour lire une des lectures de la messe et cet homme lui répond : si vous voulez, mais pas la lecture de l’Ancien Testament, je refuse de lire ces horreurs ! Cette vision du 1° Testament qui entraine un mépris pour ce livre est une très vieille hérésie condamnée dès le milieu du 2° siècle, celui qui en a été le grand promoteur s’appelait Marcion. L’hérésie a été condamnée, mais hélas, sa doctrine continue à faire des adeptes parmi certains chrétiens qui n’accordent aucun intérêt à ces textes.

Alors, certains diront : oui, il y a 5% des textes du Premier Testament qu’on pourrait garder car ils commencent à esquisser le portrait d’un Dieu Amour, mais tout le reste n’a aucun intérêt puisqu’il n’est question que de violence, de nationalisme, de coucheries, de trahisons, d’exploitation des pauvres … N’oublions jamais que s’il y a tant de violence et de bassesses dans la Bible, c’est parce qu’il y a de la violence et des bassesses dans la vie des hommes, des hommes de la Bible comme dans la vie de ceux d’aujourd’hui et donc dans notre vie aussi. Mais c’est justement la grandeur du Premier Testament que de montrer un Dieu qui décide de faire Alliance avec ce peuple dont la vie n’est pas très reluisante et Dieu restera toujours fidèle à son Alliance malgré ses espoirs sans cesse déçus. Finalement, la bonne nouvelle, c’est que Dieu n’attend pas que nous soyons parfaits pour nous proposer de marcher avec lui parce que Dieu a bien compris que c’est en marchant avec lui que nous deviendrons meilleurs, alors il nous prend tels que nous sommes et patiemment chemine avec nous en nous entourant de tant d’amour. Et c’est ainsi que jour après jour, marchant avec Lui, nous devenons meilleurs.

Cette page du livre d’Osée nous montre justement l’amour que va déployer le Seigneur, les soins que le Seigneur va prodiguer à son peuple, la tendresse dont il va l’entourer pour qu’il devienne meilleur: « Je guidais mon peuple avec humanité, par des liens d’amour ; je le traitais comme un nourrisson qu’on soulève tout contre sa joue ; je me penchais vers lui pour le faire manger. » On aurait envie de dire que nous découvrons un Dieu qui a des sentiments profondément humains … à moins que ce ne soit l’homme qui ait des sentiments divins quand il agit de cette manière !

Relevons encore cette parole qui a inspiré tant de commentateurs : « Mon cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent. Je n’agirai pas selon l’ardeur de ma colère, je ne détruirai plus Israël, car moi, je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu saint, et je ne viens pas pour exterminer. » « Mon cœur se retourne contre moi », Benoit XVI va commenter avec tellement d’à propos cette parole dans « Deus Caritas est » et François, au cours de l’année de la miséricorde, a également repris le commentaire de son prédécesseur en y ajoutant son grain de sel. Quelle parole merveilleuse : « Mon cœur se retourne contre moi ! »Oui, la justice aurait voulu que les hommes soient condamnés pour tant de désobéissances à l’égard de la Loi vis-à-vis de laquelle ils s’étaient pourtant engagés. Rappelons-nous ces paroles de la conclusion de l’Alliance prononcées par le peuple : Tout ce que le Seigneur a dit, nous le ferons ! L’histoire nous montre que ça n’a jamais été le cas très longtemps. La justice aurait voulu que les hommes soient condamnés, nous avons médité cela avec ceux qui participent à la retraite fondamentale. Oui, ce qui aurait été juste, c’est que Dieu condamne, mais Dieu constate que son cœur se retourne contre lui. C’est un peu comme si Dieu disait : Ma miséricorde se retourne contre ma justice et c’est toujours la miséricorde qui l’emporte !

En découvrant cela, certains sont émerveillés, ce sont ceux qui ont conscience d’être des pécheurs, mais d’autres, ceux qui se croient justes, trouvent que ce n’est quand même pas normal que les pécheurs soient aussi bien traités que les vertueux. Ils aimeraient quand même que Dieu punisse les méchants un peu plus souvent ! Heureusement que Dieu ne les écoute pas car, quand ils souhaitent une punition pour les pécheurs et les méchants, ils oublient qu’eux-mêmes sont souvent pécheurs et méchants !

Alors, pour que tout soit définitivement clair, pour clouer le bec à ceux qui se croient justes, Dieu conclut en disant : « car moi, je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu saint, et je ne viens pas pour exterminer. » Avec le psalmiste, nous pouvons nous écrier, bouleversés par tant d’amour : Quel Dieu est grand comme Dieu ?! (Ps 76)

En ce qui concerne l’Evangile, je suis un peu en difficulté car il ressemble pas mal à l’Evangile de dimanche dernier que j’ai déjà commenté ici en développant ce que j’ai appelé le décalogue des disciples-missionnaires. Alors bien sûr, les retraitants n’étaient pas là, mais les membres de la communauté ne seraient pas très contents de m’entendre redire les mêmes choses ou presque ! C’est pourquoi j’ai choisi de ne développer qu’un seul point. Après l’appel des disciples entendu hier, nous avons, aujourd’hui, les consignes qui sont données à ceux que Jésus a choisis. Ces consignes peuvent facilement se résumer par ces mots : pour la mission, qui consistera, comme le rappelait le père Christian, à faire ce que Jésus lui-même faisait, il ne faut pas se fourvoyer en cherchant un certain nombre de points d’appui, de sécurités en dehors de Jésus.

C’est un risque permanent que de chercher la performance dans la mission non pas en s’appuyant sur le Seigneur, non pas en comptant sur la puissance du Saint Esprit, mais en cherchant à nous appuyer sur un certain nombre de moyens extérieurs. C’est pourquoi Jésus dit : n’emportez rien ! Certes, les moyens sont toujours nécessaires, mais rarement suffisants ! Par exemple, changer la sono d’une Eglise ne remplira pas cette église si ce qui est dit au micro est insipide et ne touche pas les cœurs, si ce qui est chanté dans les micros ne conduit pas vraiment à la prière. Les moyens ne sont que des moyens. A travers ce texte d’Evangile, j’entends une question que Jésus veut nous poser : pour accomplir ta mission, quels points d’appui cherches-tu ? Est-ce sur ta foi que tu t’appuies, sur le fait que Jésus t’a promis d’être avec toi et qu’il t’a revêtu de l’onction du Saint-Esprit ou est-ce que tu es toujours à la recherche de trucs qui marchent ? 

Je me rappelle cette belle histoire que m’a raconté un ami protestant évangélique. Aux Etats Unis, un pasteur entend un appel à quitter sa paroisse qui était une belle paroisse, très vivante pour vivre une mission d’évangélisateur itinérant. Il part donc avec sa femme et, pour respecter l’Evangile à la lettre, il vend tout ce qu’il avait et donne l’argent aux pauvres. Il ne garde qu’une vieille voiture. Il commence donc cette mission de prédicateur itinérant et constate une fécondité extraordinaire. Il prêche dans des lieux tous plus improbables les uns que les autres et il est émerveillé de constater tant de conversions, certes, il se fait parfois jeter, mais ça n’entame pas son enthousiasme ! Son itinérance le conduit dans une ville où il se rappelle qu’il a un ami avec lequel il a été étudiant. Il le cherche et finit par le trouver va le trouver. En arrivant chez lui, il constate que son ami a très très bien réussi dans la vie. Il passe quelques jours de repos chez lui et, quand il veut repartir, ce qui devait arriver arriva, sa vieille voiture ne démarre plus. 

Son ami lui dit : laisse-moi t’acheter une nouvelle voiture, ça sera ma participation à ta mission parce que j’admire que tu fais avec ta femme. Il refuse car, par fidélité à l’Evangile, il veut rester pauvre. L’ami lui dit alors, on va appeler un garagiste qui va réparer ta vieille guimbarde mais je tiens à te donner un chèque en blanc que tu utiliseras pour t’acheter une voiture quand celle-là finira par te lâcher pour de bon ! Le pasteur finit par accepter et repart en mission. Au bout de quelques semaines, il constate qu’il n’y a plus la même fécondité à sa mission ; lui, il a toujours le même enthousiasme, mais il n’y a plus autant de belles conversions. Avec sa femme, ils prient et réfléchissent pour essayer de comprendre les raisons et c’est là qu’ils se rappellent ce chèque en blanc. Ils le déchirent immédiatement parce qu’ils comprennent qu’avec ce chèque, ils avaient une sécurité qui les empêchaient de compter totalement sur le Seigneur. L’ayant déchiré, ils repartent et constatent que la prédication retrouve très vite une vraie fécondité. 

Alors posons-nous la question : et moi, est-ce qu’il y aurait, dans ma vie, un point d’appui que je me serai fabriqué et auquel je tiens tellement que j’en viens à ne plus vraiment compter sur le Seigneur ? Esprit-Saint éclaire-nous et donne-nous la force de lâcher ce qui nous encombre ! Comme le disait « la Madre » (Ste Thérèse d’Avila) : Solo Dios basta, Dieu seul suffit !

Cette publication a un commentaire

  1. Adéline GRYSELEYN

    Amen

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