Jeudi 16 février après-midi.
J’avais terminé le précédent avec le début de la journée du jeudi, passons à la suite ! En fin d’après-midi, il y a eu la rencontre pour les célibataires, c’est-à-dire les jeunes qui sont étudiants, jeunes professionnels … ou chômeurs puisqu’il y a assez peu de travail ! De toutes façons, tous les jeunes sont célibataires parce que le mariage ne peut pas avoir lieu trop tôt à cause du système de la dote. La famille du garçon doit payer la dote à la famille de la fille … et il faut souvent du temps pour réunir cette somme d’argent. Je n’approuve pas ce système, mais qui suis-je pour juger cette coutume d’une culture que je suis loin de connaître et de comprendre vraiment !
Les célibataires sont venus très nombreux ! C’est le groupe le plus nombreux et peut-être celui qui est animé de la plus grande soif. La plupart de ces jeunes appartiennent à des mouvements de chrétiens et beaucoup au Renouveau Charismatique qui est, sans doute, la plus grande force de ce pays en nombre et en dynamisme. Le thème de mon enseignement était : Le combat pour la protection et la croissance de l’amour chez les jeunes. J’avais préparé cet enseignement dans l’avion, mais je ne me suis pas servi de cette préparation … ce qui a été vécu depuis le début de la semaine m’a inspiré d’autres choses à dire. Pendant que je parle aux célibataires, l’abbé Pierre donne un enseignement aux veuves et aux veufs.
Vendredi 17 février.
Cette journée a été encore bien chargée ! Le matin, il me fallait préparer l’enseignement pour les jeunes lycéens qui viendraient en débit d’après-midi puis pour les couples en fin d’après-midi. Pour les jeunes, je me suis inspiré de ce que j’avais dit aux célibataires, mais en le retravaillant pour le simplifier et l’adapter. Bonne rencontre ! Ensuite, j’enchaine avec les couples. Là encore, je m’inspire de ce que j’ai dit aux célibataires, mais en le transformant pas mal. Il ne faut pas que mon enseignement soit trop long car, à la suite, il y a un enseignement donné aux hommes par le père Amand et un autre pour les femmes, donné par l’abbé Pierre. Le père Amand m’a demandé de venir avec lui. J’apprécie ses enseignements et je vois bien que nous sommes complémentaires. Moi, je donne un enseignement de fon et lui, il peut faire des applications concrètes en tenant compte de la culture. C’est ce qui se passe aussi dans les homélies. Il développera ce thème : la paternité des hommes doit être le reflet de la paternité de Dieu et il donnera 3 points essentiels : Dieu est Providence, donc vous devez vous décarcasser pour assurer ce qui est nécessaire à la vie de votre famille. Dieu nous protège, vous devez donc protéger vos familles et pour cela vous devez être présent (la présence des hommes au bistrot qu’on appelle cabaret est un fléau). Dieu nous fait grandir par son autorité, vous devez donc exercer l’autorité à la maison pour faire grandir, donc sans être autoritaire.
Le soir, il me faut commencer à préparer l’enseignement de demain pour les couples, je n’ai rien de prêt ! Le thème est : La mission du couple dans l’annonce de l’Evangile de l’amour. Comme souvent, je lis un ou deux articles sur internet et c’est comme ça que je tombe sur un petit article d’une théologienne parlant du chapitre 4 d’Amoris Laetia et disant que ce chapitre est un bilou ! Elle n’en dit pas plus, mais ça me donne envie de le lire ! De fait je vais y trouver la matière pour mon enseignement. Amoris Laetitia, c’est le texte écrit par le Pape en 2016 suite aux deux synodes sur la famille. Et, vraiment ce chapitre 4 est une pépite qui pourrait être la base pour animer bien des récollections pour les couples ! Je traville assez tard, mais sans pouvoir terminer, je suis trop fatigué !
Samedi 18 février.
Lever de bonne heure pour continuer mon travail, je n’irai pas à l’office des Laudes avec la communauté, je le prie seul à mon lever à 5h15 ! J’avance bien, quand je vais au petit déjeuner, je n’ai pas encore fini, mais je vois que j’y arriverai puisqu’il me reste une heure avant l’intervention ! Après mon enseignement, les couples présents sont invités à vivre un temps en couple, un « devoir de s’asseoir » comme on le dit dans les Equipes Notre Dame. Le père Amand leur donne 3 propositions pour ce temps et il faudra les faire les 3, ce n’est pas au choix ! 1/ Dire à l’autre les qualités que l’on apprécie chez lui, chez elle. 2/ Formuler une demande de pardon à l’égard de l’autre. 3/ Demander à l’autre de changer sur un point et un seul qui soit vraiment déterminant. Très bel exercice ! C’est très beau de voir tous ces couples dispersés sur tout l’espace du Foyer. Hélas, le temps n’est pas clément, il y a des averses, mais ça ne décourage pas les couples ! Magnifique et prometteur parce que ce n’est pas tellement dans la culture … surtout celle des hommes que d’écouter leurs femmes !
Vers 14h45 commencera la messe avec une proposition de prière de guérison pour les malades. L’Evangile est celui de la Transfiguration. Et c’est très beau parce que le « préau » sous lequel est installé le podium s’appelle le Thabor ! Nous étions donc au Thabor pour cette messe qui nous promettait de voir, nous aussi, la gloire de Jésus, comme les apôtres l’ont vue au sommet du mont Thabor. C’est ce que développe le père Amand dans son homélie.
Après l’oraison finale, le Saint Sacrement est exposé quelques instants et ensuite, nous passons dans toutes allées pour bénir les gens … et ils sont nombreux ! J’ai été tellement touché, une nouvelle fois, parce que je l’avais déjà vu dans mes séjours précédents, j’ai été tellement touché par l’attitude de foi des gens quand on passait au milieu d’eux avec Jésus-Eucharistie : Certains baisaient notre étole quand nous portions le St Sacrement, ils agissaient comme la femme de l’Evangile qui vient toucher Jésus au milieu de la foule en disant : si je peux au moins toucher la frange de son manteau, je serai sauvée ! Quelle foi !
A la suite, un petit groupe de personnes ayant le « charisme de connaissance » annoncent les guérisons que Jésus a accomplies quand il est passé … impressionnant ! Evidemment, ces guérisons demanderont à être confirmées. Cela se passe de la même manière chaque année, dans les jours ou semaines à venir, des personnes viendront au Foyer avec un certificat médical prouvant que, après analyses ou consultation, des personnes qui avaient telle maladie depuis tant de temps ne l’avaient plus ! Je sais que ça parait étonnant pour ne pas dire bizarre à certaines personnes … mais voilà Jésus n’a rien perdu de sa puissance et il peut toujours accomplir des merveilles. On se croit au temps des Actes des Apôtres !
Du coup, la messe avec ce temps de prière durera 5h30 ! Record battu ! Il faut avoir une vessie suffisamment large pour tenir ! Mais c’est tellement beau ! Au soir de cette journée, je peux dire : merci, Seigneur ! J’ai en effet fini la série de mes interventions. L’Esprit-Saint, comme toujours a été au rendez-vous pour m’inspirer. Je crois que mes enseignements ont été appréciés, d’ailleurs, le père Amand m’a fait un beau compliment : tu parles comme un africain ! Non seulement tu parles longtemps, mais, en plus tu parles de manière simple et imagée ! Je remercie aussi le St Esprit qui nous a donné de voir les merveilles accomplies par le Seigneur.
Dimanche 19 février.
C’est la clôture de la semaine St Valentin ! Avant la messe, pendant 1h30, il y a un temps de louange et de témoignages. Hélas je n’ai pas tout compris des témoignages car la sono était très forte et celui qui me traduisait ne parlait pas assez fort ! Les gens étaient invités à venir dire ce qu’ils avaient reçu comme cadeaux dans leur vie affective et conjugale depuis qu’ils venaient à ces semaines St Valentin. Ce que j’ai pu entendre et comprendre m’a édifié, témoignages, extraordinaires ! On voit comment la foi change la vie de ces couples chrétiens, mais vraiment chrétiens. L’homme se comporte d’une toute autre manière avec sa femme, ses enfants. Oui, la foi a vraiment une puissance de transformation pour ceux qui l’accueillent ! Je le vérifie !
A ce sujet, je veux dire un mot de la belle homélie du père Félix, curé de la cathédrale, responsable de la pastorale familiale. Il est parti sur ce que Jésus disait : il vous a été dit et moi je vous dis. Il a invité les gens à ne pas garder tout ce qu’on leur avait dit pour faire de la place à la nouveauté de la Parole de Jésus. Je retiens deux exemples : il vous a été dit à vous les hommes qu’il fallait frapper vos femmes si vous vouliez qu’elles soient soumises, eh bien Jésus vous dit de les aimer et qu’elles sont égales à vous en dignité ! Il vous a été dit que lorsque vous étiez hutu, il ne fallait pas vous marier avec un tutsi et inversement, eh bien, Jésus dit que vous êtes tous des enfants de Dieu à égalité de dignité … C’était très fort et percutant !
A la fin de la messe, il y a toute une série de démarches qui sont proposées aux différents groupes présents : Chaque groupe vient recevoir une bénédiction particulière : les veuves et veufs, les enfants (ils ont été rajoutés au dernier moment), les jeunes et les couples. Avec le monde qu’il y avait, ça a duré longtemps ! Au total, la messe durera plus de 4 heures … on ne mange pas de bonne heure !
Je dis un mot de la démarche proposée aux célibataires. Il leur est proposé, proposé et donc pas imposé, de faire une démarche particulière. Ceux qui le veulent, donc, peuvent s’engager à vivre la chasteté jusqu’à leur mariage en demandant la grâce de Dieu pour y parvenir. Beaucoup le font ! Peut-être que cette démarche nous étonne, je l’ai comprise peu à peu. D’abord, il faut tenir compte de la culture où la sexualité tient une place démesurée, mais cachée ! Au-delà du respect de la loi de l’Eglise, c’est donc une proposition faite aux jeunes de découvrir que lorsqu’on gaspille son amour en étant jeune, il risque d’être difficile de le vivre de manière épanouie et épanouissante quand on sera devenu adulte. C’est une manière de se démarquer de la culture ambiante et de dire qu’on veut construire un couple sur d’autres bases. Et, on peut l’imaginer, la vie de ces jeunes qui ont choisi de vivre ainsi ne sera pas facile parce qu’il y a des tentations et que les autres jeunes se moqueront d’eux. Mais ceux qui tiennent (ou qui reprennent après une chute) préparent une belle vie de couple, depuis le temps qu’ils proposent cette démarche, le Foyer peut le vérifier ! Sans compter que les jeunes étudiants qui font cette démarche ne gaspille pas leur temps inutilement dans les boites de nuit, ils étudient plus sérieusement que les autres et réussissent mieux que les autres et ont donc de meilleures places que les autres au travail !
Sieste courte après le repas où nous accueillons deux séminaristes et les neveux d’une des membres, fondatrice du Foyer, Anne-Marie. Ensuite, le père Amand me promène un peu pour voir un lieu sur lequel le Foyer a un projet … mais c’est un peu tôt pour en parler ! Je retrouve la circulation si particulière où on risque l’accident à chaque instant avec les vélos, motos qui doublent n’importe comment. Ils sont interdits au centre-ville, là où est le Foyer, mais autorisés en périphérie. Et puis la route est tellement défoncée qu’il faut slalomer entre les énormes nids de poule … ceux qui viennent en face doivent s’adapter !
Le père Amand, au repas, me demande de continuer à présider et prêcher aux messes jusqu’à mon départ. J’aurais aimé me coucher tôt, mais je dois me mettre à la préparation de l’homélie !
Lundi 20 février.
Ce matin, je rédige un peu mon journal. Je vais sur le site pour faire quelques photos des jeunes qui aident au démontage.
Ensuite nous partons pour un temps convivial et fraternel entre prêtres. Repas au bord du lac : bon moment !
Au retour, nous sommes pris dans un embouteillage monstre ! Et quand c’est comme ça, il y en a qui essaient quand même de passer en roulant à contre-sens s’il le faut, sans que les policiers ne disent rien ! Comme ça c’est vraiment bloqué après !
Merci infiniment Père Roger pour ce partage. Malgré votre charge de travail et la chaleur, vous nous avez fait vivre, par votre journal, cette belle et puissante semaine tellement enrichissante pour nous ici. Nous mesurons ô combien ces gens vous remercient par leurs présences et leurs participations. Votre bonheur est intense et votre joie communicative : prenez soin de vous en ces derniers jours et bon voyage pour votre retour, en attendant votre prochain retour au Burundi.
Merci Joëlle ! Le retour au pays approche, je suis bien triste de laisser cette Afrique que j’aime tant !