Le titre de cette fête résonne comme un slogan : Tous saints ! Comme certains pourraient crier dans une manif : tous propriétaires ! Sauf qu’à première vue, il semblerait plus facile de devenir propriétaires que de devenir saints. Même ceux qui n’ont pas le sous doivent le penser. En effet quand on parle de saints, immédiatement, un certain nombre de noms viennent en farandoles dans notre esprit : St François d’Assise, St Dominique, St Ignace de Loyola, Ste Thérèse d’Avila ou de Lisieux, Ste Mère Teresa : j’en passe et des meilleurs ! Alors, il faudrait être bien présomptueux pour prétendre que notre nom ne ferait pas tache, ajouté à cette litanie de personnes hors du commun. Et c’est ainsi que, malgré l’insistance de l’Eglise, qui rappelle régulièrement l’appel universel à la sainteté de tous les baptisés, ces derniers pensent humblement qu’ils ne sont pas concernés parce que pas à la hauteur.
Remarquez c’est mieux de ne pas se sentir à la hauteur … il faudrait se méfier d’une personne qui aurait déjà dessiné l’apparence de la statue qui la représenterait dans toutes les églises du monde ! Mais pour autant, ce n’est pas bien de refuser de répondre à cet appel à la sainteté relancé par la célébration de la fête que nous vivons et qui nous redit fortement : Tous saints ! Avant de voir comment nous pourrions devenir des saints, je voudrais commencer à réfléchir avec vous sur les enjeux : pourquoi est-il si important de devenir des saints ?
Vous me permettre de répondre à cette question en citant mon compatriote, le Saint curé d’Ars, il aimait dire : là où les saints passent, Dieu passe avec eux. C’est d’ailleurs cette citation qu’avait écrite le pape Jean-Paul II sur le livre d’or du sanctuaire lors de son passage en 1986. Là où les saints passent, Dieu passe avec eux. Ne croyez-vous pas qu’il serait assez urgent que Dieu passe dans notre monde ? Il y a tellement de choses qui ne vont pas très bien : commençons par les foyers de guerre, l’année dernière 61 graves conflits étaient recensés ; mais il y a aussi la faim dans le monde, pendant qu’on parle non plus de millionnaires mais de billionaires, plus de 10% de l’humanité vit en-dessous du seuil de pauvreté ! On pourrait encore évoquer la faim dans le monde, toujours pas résolue, le dérèglement climatique, la violence des jeunes, les méfaits des réseaux sociaux répandant toutes ces informations fausses et malsaines et tant d’autres choses inquiétantes ! Oui, il y aurait bien besoin que Dieu passe dans notre monde d’aujourd’hui pour l’assainir car notre monde n’est pas sain : « s.a.i.n. » Et c’est justement pour passer dans notre monde qui n’est pas sain qu’il y a besoin de saint, « s.a.i.n.t. » parce que, là où les saints passent, Dieu passe avec eux !
Très bien, me direz-vous, mais comment une personne moyenne comme moi pourrait-elle devenir sainte ? C’est vrai, tous ceux qui ont un minimum d’humilité n’oseraient pas inscrire leur nom à la suite de la litanie des grands saints de l’Eglise. Pourtant, il y a bien cet appel à la sainteté qui nous rejoint tous et que cette fête nous rappelle : Tous saints ! Pour nous encourager à croire que cet appel est pour nous, que nous ne sommes pas disqualifiés dans la marche vers la sainteté, j’aimerais vous partager trois convictions importantes.
La 1° conviction, je l’emprunte encore à mon compatriote, le Saint Curé d’Ars. Avec la malice qui le caractérisait, il aimait répéter : les saints n’ont pas tous bien commencé mais ils ont tous bien fini ! C’est vrai que la vie d’un certain nombre de saints n’a pas été un parcours très rectiligne, leur première partie de vie ayant été très chaotique. Alors, ne nous décourageons pas, Dieu n’en a pas fini avec nous ! Aujourd’hui, tels que nous sommes, là où nous en sommes, laissons-nous aimer et façonner par l’amour purificateur de la miséricorde.
La 2° conviction, c’est qu’il faut que nous arrêtions de confondre sainteté et perfection. Un saint n’est pas quelqu’un de parfait, aucun des saints du ciel, dont nous demandons l’intercession, ne l’a été. Le curé d’Ars, toujours lui, si on l’avait laissé faire, il serait allé se confesser tous les jours ! En effet, plus on s’approche de Dieu et plus on mesure que notre amour n’est pas la hauteur. Un saint, ce n’est donc pas quelqu’un de parfait, mais quelqu’un qui accepte de se laisser parfaire, ce n’est pas pareil ! Alors si vous êtes prêts à vous laisser parfaire, c’est plutôt bien parti, le chemin de la sainteté s’ouvre grand !
Enfin, la 3° conviction, dans le prolongement de ce que je viens de dire, c’est que la sainteté ne s’acquière pas à coup de mérites obtenus à la force du poignet. Ceux qui rêvent d’obtenir un corps d’athlète, savent bien que ce corps ne viendra qu’à force de renoncements et d’entrainements douloureux. Si nous voulons obtenir un cœur de saint, ce n’est pas du tout de cette manière que ça va se passer. En effet, rendre saint, c’est la mission de l’Esprit-Saint. J’aime bien dire que le nom par lequel on l’appelle est un raccourci ; Esprit-Saint, c’est la contraction de l’Esprit qui fait les saints. Au sein de la Trinité, c’est la mission qu’il a reçue : transformer tous les pauvres en saints. Oui, parce que l’Esprit qui fait les saints, on l’appelle aussi le Père des pauvres. Donc, sa mission, c’est bien ça, transformer tous les pauvres qui acceptent de se laisser parfaire en saints qui permettront à Dieu de passer avec eux, à travers eux, partout où ils passent.
Vous vous rendez compte de ce que pourrait devenir le monde si les 2,5 milliards de chrétiens prenaient au sérieux l’appel de cette fête qui nous invite à devenir tous saints en vivant l’esprit des Béatitudes ? Par l’intercession de Notre Dame de Laghet et de tous les saints du ciel que nous fêtons aujourd’hui, et qui rêvent de devenir nos supporters, décidons de quitter la « moyenneté » dans laquelle nous nous complaisons trop souvent pour marcher résolument sur le chemin de la sainteté. N’oublions jamais : là où les saints passent, Dieu passe avec eux !
