2° dimanche de carême : Ecoutez-le !

Vous savez que les évangiles de carême, particulièrement ceux de l’année A qui est l’année liturgique dans laquelle nous nous trouvons, ont un but bien spécifique. Ils ont été choisis pour parfaire la formation des catéchumènes. Avec cette information, nous avons une clé d’interprétation très importante. Il nous faut chercher, dans chaque évangile de carême, le cœur du message chrétien, le cœur de l’expérience chrétienne que l’Eglise veut transmettre aux catéchumènes pour qu’ils puissent mener, après leur baptême, une vie authentiquement chrétienne. 

Certes, nous, nous ne sommes baptisés depuis pas mal d’années, pourtant nous pouvons accueillir, comme les catéchumènes et avec les catéchumènes le cœur du message chrétien, le cœur de l’expérience chrétienne. Si nous le faisons avec enthousiasme, nous donnerons un élan nouveau à notre vie de foi.

Dimanche dernier, le message pour les catéchumènes était clair : il n’y a pas de vie chrétienne possible sans combat. Et si jamais nous avons l’impression de ne pas être confronté au combat dans notre vie, ce n’est pas une bonne nouvelle, c’est plutôt le signe que nous sommes installés dans la tiédeur. Le Malin ne nous attaque plus parce que notre tiédeur est le signe de sa victoire déjà acquise !

Ce dimanche, nous avons de la chance parce que le message pourrait difficilement être plus clair ! En effet, c’est Dieu lui-même qui a pris la peine de nous le faire entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! » Rappelons-nous bien que, la parole que, la Parole prononcée par Dieu du milieu de la nuée, l’Eglise la répercute particulièrement pour les catéchumènes et, par ricochet, pour tous ceux qui veulent donner un nouvel élan à leur foi. 

Alors, quelle conclusion en tirer ? Je vous propose une formule facile à retenir : être chrétien, ce n’est pas d’abord imiter Jésus mais l’écouter. Il y a eu tout un temps où on aimait souligner les valeurs de l’Evangile, les convictions de Jésus et on disait qu’être chrétien, c’était vivre de ces valeurs, partager ces convictions. Etre chrétien, c’était donc imiter Jésus, le moins mal possible, en intégrant, le plus possible, les valeurs et les convictions que l’animaient. Mais vous voyez tout de suite les risques de cette présentation car il y en a au moins deux. 

  • D’abord, on réduisait Jésus un personnage du passé, brillant certes, mais appartenant à l’histoire et, parce qu’on ne voulait pas le laisser sombrer dans l’oubli, on cherchait à faire vivre en nous ce qui le faisait vivre, lui. Du coup, il n’y avait qu’une différence qualitative entre Jésus et les autres grands hommes de l’histoire, il avait juste été mieux qu’eux. Alors, on chantait sans difficulté : ils ne mettaient jamais la main sur un fusil, Gandhi, Luther King ou Jésus-Christ ! Attention le Père du ciel n’a pas dit : Jésus est extraordinaire, il a dit : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie. » Et l’événement de la Transfiguration laisse entrevoir qui est réellement cet homme, à première vue, semblable à tous les autres hommes et pourtant si différent.
  • L’autre difficulté, c’est que proposer comme idéal de vie chrétienne « l’imitation de Jésus-Christ » ça risque bien de décourager, à terme, car le modèle est inatteignable ! Je sais bien que l’un des best-sellers de la vie spirituelle s’appelle « l’imitation de Jésus-Christ » mais ce n’est pas le 1° livre à mettre entre les mains des catéchumènes. Car on ne peut désirer et parvenir un peu à imiter Jésus que lorsque notre cœur est dans une grande union avec lui, l’imitation de Jésus-Christ sera toujours une grâce à demander et non un projet à mettre en œuvre.

Oui, soyons vraiment attentifs quand le Père du ciel nous parle parce que ses paroles sont finalement assez rares dans le Nouveau Testament. Il n’a pas dit « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie, alors, imitez-le ! » Il ne l’a pas dit parce que, devenir authentiquement chrétien, c’est justement ne plus considérer Jésus comme un admirable personnage du passé qui nous aurait laissé un beau programme de vie. Devenir chrétien, ce n’est plus considérer Jésus comme un personnage du passé mais avoir une relation avec lui comme on peut l’avoir avec une personne vivante. Et si Jésus est vivant, alors il faut que j’arrête de penser que vivre en chrétien consisterait à se transformer en exécuteur testamentaire de ses dernières volontés ! Jésus est vivant, donc il m’accompagne, donc il me parle. C’est bien pourquoi le Père du ciel dit : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! » 

Ecoutez-le ! Ecoutons-le ! Est-ce que nous croyons que Jésus peut nous parler ? Et si nous le croyons, quelle place accordons-nous au silence dans notre vie ? Oh je sais, nos vies peuvent être agitées mais nous pouvons toujours décider de ne pas mettre l’auto-radio dans notre voiture quand nous faisons un trajet seul, même si ce trajet n’est pas très long ! Nous pouvons toujours profiter des deux minutes d’attente à la caisse d’un magasin pour ne pas consulter notre smartphone et entrer dans un silence de cœur qui est possible même en plein brouhaha ! Et puis, à la suite de ces deux journées communautaires que nous venons de vivre et des excellents apports qui nous ont été faits, je vais nous donner un truc encore plus efficace pour trouver du temps afin de pouvoir écouter Jésus. Dès que vous avez envie de critiquer quelqu’un, faites plutôt silence ! Dès que vous entendez qu’un petit groupe est dans la critique, fuyez-le et entrez dans le silence … vous verrez ça va libérer pas mal de temps pour le silence de l’écoute !

J’aimerais encore préciser qu’écouter Jésus, ce n’est pas d’abord une histoire de temps mais, c’est une histoire de foi. Croyons-nous vraiment qu’il veut et qu’il peut parler à chacun de nous ? Si le pape nous envoyait un texto avec cette demande en forme de supplication : j’aimerais tant avoir un rendez-vous quotidien avec toi parce que j’aimerais tant te parler … qui oserait lui répondre : désolé, pas possible pour moi, trop occupé, cherche quelqu’un d’autre ! Impensable … et pourtant c’est bien ce texto que nous envoyons si souvent à Jésus !

Ecoutez-le ! Ecoutons-le ! Oui, est-ce que nous lisons la Parole de Dieu comme une Parole vivante parce que, nous le savons bien, c’est aussi et surtout de cette manière qu’il nous parle ? Alors, est-ce que chaque jour nous accueillons cette Parole comme sa Parole pour moi ? Pour que ça marche mieux, avant de lire la Parole du jour ou celle qu’il nous est donné d’entendre, il peut être bon de faire une prière de ce genre : « Seigneur, je crois que c’est la Parole que tu m’adresses aujourd’hui, à moi, dans la situation que je vis, donne-moi de l’entendre ! Saint-Esprit, donne-moi d’accueillir cette Parole comme un cadeau, comme une lampe pour éclairer mes pas et agis sur ma mémoire pour que je ne l’oublie pas ! »

Ecoutez-le ! Ecoutons-le ! Est-ce qu’avant de prendre des décisions, enfin des décisions engageantes, nous essayons de l’écouter ou est-ce que nous fonçons n’écoutant que nos convictions, notre sens du devoir ou pire encore, est-ce que nous fonctionnons uniquement par habitude. Ecoutez-le ! Ecoutons-le ! Attention, ne nous comportons pas avec le Seigneur comme on se comporte avec certaines personnes : avant qu’elles ne parlent, on a l’impression de déjà savoir ce qu’elles vont nous dire ! 

Ecoutez-le ! Ecoutons-le vraiment comme Abraham. C’est avec cette parole qu’a commencé l’histoire de la Foi. Ecoutez-le, Ecoutons-le … il a une parole de bénédiction pour chacun.

Cet article a 2 commentaires

  1. wilhelm richard

    si j’ai bien compris votre homélie, je peux la résumer en deux phrases.
    Limitation de Jésus-Christ : avec la grâce de Dieu, rien ne peut nous arrêter, même la poudre arrêt-curé !
    Si je veux que mon écoute avec Dieu porte beaucoup de fruits, il faut que je la cueille !

    1. Père Roger Hébert

      L’Esprit te donne toujours de l’esprit !

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