25 octobre : mardi 30° semaine ordinaire Ecoutez la différence chrétienne !

Ce passage de la lettre aux Ephésiens est sûrement l’un des plus beaux textes de l’Ecriture concernant le mariage, c’est aussi le moins souvent choisi ! Peut-être est-il encore choisi par des fiancés très cathos qui ont eu une formation biblique et qui ont des familles cathos qui ne seront pas choquées par les paroles de Paul. Mais, pour les fiancés lambdas, pas question ! Et si jamais ce qui leur a été dit au cours de la préparation au mariage pouvait les encourager à choisir ce texte, en le testant auprès de leurs amis et de leurs familles, ils comprendraient vite que ce n’est pas une bonne idée ! Ce que je vous dis-là, c’était ce que je percevais quand j’étais curé de paroisse, et ça ne remonte qu’à 5 ans. En plus, depuis, il y a eu la campagne MeToo, alors je ne vous explique pas la difficulté qu’il y aurait à lire un texte qui parle de soumission des femmes à un public de personnes très peu formées aux Ecritures. Bien sûr, le prêtre ou le diacre devrait expliquer, mais j’ai bien peur qu’avant même de pouvoir expliquer certains auraient quitté l’Eglise en manifestant bruyamment leur mécontentement !

Remettons tout cela dans le contexte de l’époque. Il est bien évident qu’au temps de Paul, les paroles qu’il prononçait ne choquaient personne dans son auditoire, du moins les paroles du début ! Quand Paul invitait les femmes à être soumises à leur mari, il ne faisait que reprendre ce que tout le monde pensait et disait, ça ne faisait pas de vagues, y compris chez les femmes. Mais dans ses paroles, Paul ne va pas se contenter de répéter ce que tout le monde dit. Si les chrétiens se contentent de toujours répéter ce que tout le monde dit, ils deviendront vite insignifiants. C’est un véritable défi qu’il nous faut relever en permanence : il nous faut adapter le message de l’Evangile aux mentalités modernes, sans le dénaturer, sans forcément chercher à être dans le vent. J’aime ce dicton : être dans le vent ça ne peut être un idéal que pour les feuilles mortes ! Ce qui va donc être important, c’est de faire entendre la différence chrétienne de manière audible. Je vous ai dit que j’étais originaire du diocèse du curé d’Ars et, chez nous, il y a cette région qui produit les fameux poulets de Bresse. Quand on entre sur le territoire de la Bresse, il y a des grands panneaux d’affichage avec 3 poulets stylisés, dessinés en bleu, en blanc et en rouge et sur le panneau cet énorme slogan : vous entrez en Bresse, goûtez la différence ! Eh bien, dans ce texte, la différence chrétienne, on la goûte vraiment.

Première différence, dans le discours invitant les femmes à la soumission, discours qui, je le redis, convenait à tout le monde, Paul va dire que ce ne sont pas les hommes qui doivent soumettre leurs femmes. Sous-entendu, les hommes n’ont pas à utiliser la contrainte ou pire, la violence, pour que leurs épouses leur soient soumises. Paul dit que c’est aux femmes de gérer elles-mêmes cette soumission. Vous pourriez penser que c’est encore plus terrible de dire ça ! Non ! Car Paul insère un élément qui change tout, il dit que les femmes doivent apprendre à se soumettre à leurs maris comme elles se soumettent au Christ. Quelle différence ! Il ne viendrait à l’idée de personne de remettre en cause le fait que nous soyons soumis au Christ. Qui oserait prétendre qu’il peut dominer le Christ ou même se considérer comme son égal en tout ? Non, ça ne serait pas sérieux ! Mais, nous le savons, cette soumission que nous avons à vivre à l’égard du Christ, nous pouvons la vivre paisiblement parce que, jamais, Jésus ne cherchera à transformer notre soumission en un asservissement. C’est bien parce que nous sommes habités par cette certitude que, dans l’acte de consécration à Jésus par Marie, que nous prions chaque matin, nous acceptons de nous livrer « en toute soumission et amour. » Elle est vraiment étonnante, et même téméraire pour l’époque, cette différence chrétienne que Paul ose énoncer au milieu de ces paroles qui, dans un premier temps, convenaient à tout le monde et qui, dans un second temps, bousculent tout le monde !

La deuxième différence, nous l’entendrons encore demain à propos des enfants, c’est l’introduction de la réciprocité et c’est peut-être encore plus fou ! Que les femmes soient soumises à leurs maris, je l’ai dit, ça ne posait pas de problème, ça se compliquait un peu avec la précision que Paul apportait : cette soumission de la femme au mari devait être de même nature que la soumission au Christ. Mais ce que Paul rajoute en s’adressant directement aux hommes est complètement fou pour l’époque. 

Et vous, les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Église, il s’est livré lui-même pour elle. Aujourd’hui, nous avons du mal à comprendre ce qu’il y a de fou dans cette parole de Paul parce que, dans nos cultures, l’amour réciproque entre les époux parait évident. D’ailleurs, quand il n’y a plus d’amour, on se quitte très vite parce que seul l’amour peut souder le couple. Mais il n’en a pas toujours été ainsi et je dirai même que c’est assez récent qu’il en soit ainsi. J’avais découvert cela avec étonnement dans le cours sur le mariage que j’avais suivi au séminaire. 

Oui, c’est très récent qu’on souhaite s’aimer dans le couple, c’est très récent cette idée qu’on se marie parce qu’on s’aime. Il serait d’ailleurs préférable de dire qu’on se marie pour s’aimer, le sacrement qui est donné ne vient pas seulement couronner une histoire d’amour, il vient vivifier cette histoire, lui donner la solidité de l’amour de Dieu qui s’engage avec les époux. Oui, c’est nouveau de vouloir s’aimer dans un couple car, longtemps, les mariages ont été arrangés ; que ce soit chez les propriétaires terriens qui cherchaient comment agrandir leurs domaines, que ce soit chez les bonnes familles qui cherchaient comment offrir le meilleur parti à leurs enfants en étant plus soucieux de prospérité que d’amour. Et chez les pauvres, on faisait comme on pouvait ! Dans ce contexte, ceux qui arrivaient à trouver l’amour dans le mariage, ils avaient touché le jackpot ! Les autres se satisfaisaient de cette situation en allant souvent chercher l’amour dans des relations extra-conjugales.

Vous comprenez donc que c’est une vraie révolution que Paul introduit dans le mariage en exigeant que les hommes aiment leurs femmes. Et, comme si ça ne suffisait pas, il en rajoute encore une couche en définissant ce que doit être la qualité, la norme de l’amour des hommes à l’égard de leurs femmes : les hommes doivent aimer leurs femmes comme le Christ a aimé l’Eglise en se livrant totalement pour elle. Je pense que les chrétiens mâles d’Ephèse quand ils ont lu cette lettre ont dû en vouloir à Paul ! Finie leur tranquillité ! Et j’imagine que les femmes de la communauté chrétienne avaient épinglé cette lettre bien en évidence dans la maison pour que leurs maris l’aient constamment sous les yeux. Là, vraiment, nous n’avons pas de peine à goûter la différence chrétienne, l’invraisemblable différence chrétienne. Bon, il y aurait aussi la 2° partie du texte à commenter car elle va poser les fondements du sacrement de mariage mais nous ne sommes pas dans une semaine de préparation au mariage et il faut bien que je dise quelques mots de l’Evangile.

Dans l’Evangile, Jésus propose deux paraboles qui, finalement, ont le même sens. On le découvre mieux en commentant la 1°, l’histoire de la graine de moutarde. On tire souvent comme morale de cette histoire que ce qui est semé petit peut devenir très grand. Je ne pense pas que ce soit juste. Si Jésus avait voulu dire cela, il aurait parlé d’une graine de cèdre. Cette graine est à peine plus grosse que la graine de moutarde et là, pour le coup, elle devient un très grand arbre. La graine de moutarde, elle, elle est petite et elle ne donnera pas un grand arbre, d’ailleurs Jésus ne parle pas de grand arbre, il parle seulement d’un arbre en précisant que cet arbre est choisi par les oiseaux du ciel. Je traduis à ma manière : la graine de moutarde est petite et donnera un arbuste modeste mais peu importe puisque Dieu a choisi ce qui est petit, c’est ainsi que je comprends cette mention des oiseaux du ciel. Jésus ne parle pas des oiseaux mais des oiseaux du ciel comme pour souligner que c’est le ciel qui choisit ce qui reste petit pour y faire sa demeure. C’est ce que la Vierge Marie aura compris et qu’elle chantera dans son Magnificat. Si vous êtes petits, réjouissez-vous-en plutôt ! Ne cherchez surtout pas à jouer aux grands parce que, seuls les petits, savent compter sur Dieu.

La 2° parabole vient vraiment confirmer la 1° et de manière encore plus forte. En effet, c’est quoi du levain ? De la pourriture ! Eh bien, à travers cette parabole, j’entends Jésus nous dire qu’aucune vie, même celle qui parait pourrie n’est inutile. De cette pourriture, il peut toujours faire jaillir du bon, du bien, du grand, du beau. C’est ce que Paul dira dans la lettre aux Romains dans une de ces formules choc dont il a le secret : là où le péché a abondé, la grâce va surabonder.

Merci Seigneur, la vie est tellement plus belle, plus grande avec toi qui nous ouvre sans cesse de nouveaux horizons même et peut-être surtout quand, humainement, il ne semble plus y avoir beaucoup d’espoir.

Cette publication a un commentaire

  1. wilhelm richard

    Il ne faut pas que l’Amora le nous monte au nez : ce qu’on dit ment n’aurait alors plus de goût !

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