26 mars : l’allemand mélodieux et la colère de Dieu !

Peut-être savez-vous que ma mère était allemande. Je n’ai pas appris l’allemand avec elle parce que, à cause de la guerre, ils ont fui l’Allemagne pour fuir le nazisme, elle est donc allée très peu à l’école en Allemagne et parlait intuitivement sans pouvoir m’expliquer les déclinaisons et autres réjouissances de la langue allemande ! J’ai beaucoup perdu parce que je ne pratique plus, mais j’aime l’allemand, je défends cette langue et je n’aime pas quand on dit que c’est une langue qui sert uniquement à impressionner les chiens méchants. Non, l’allemand est une langue très mélodieuse ! Ecoutez : « Die Tasse ist zu klein ! » C’est très beau n’est-ce pas, c’est tellement mélodieux ? Alors que le français, à l’inverse, est une langue extrêmement dure : « Fermez la porte bon sang ! »

C’était pour vous faire sourire, on en a besoin, mais surtout pour vous faire réviser une homélie pas très ancienne dans laquelle j’expliquais que l’un des drames de l’évangile, c’est que nous ne connaissons pas l’intonation avec laquelle Jésus a prononcé ces paroles qui ne nous sont rapportées que par écrit. Je le redis donc, quand nous ne comprenons pas une parole de Jésus, c’est peut-être parce que nous ne l’écoutons pas avec la bonne intonation. De même s’il y a des paroles qui ne nous bousculent pas assez, c’est peut-être aussi parce que nous ne les entendons pas avec la bonne intonation.

C’est le cas pour l’évangile d’aujourd’hui. Avant de vous le montrer, je dis un mot pour signaler que pendant un bon nombre de jours, nous allons avoir des évangiles tirés de St Jean qui sont des extraits de discours de Jésus. Ces textes vont être d’une grande densité et en même temps, il sera souvent difficile d’en extraire comme un fil rouge, alors, nous ferons comme les abeilles qui passent de fleur en fleur sans forcément de parcours logique, nous ferons nous aussi notre miel en nous arrêtant sur telle ou telle phrase sans chercher une logique absolue. Et puis, je vous proposerai mon miel, sachant que le vôtre peut être largement aussi bon que le mien !

Alors pour, aujourd’hui, la phrase de l’évangile qui m’a arrêté, c’est la suivante : « D’ailleurs je vous connais : vous n’avez pas en vous l’amour de Dieu. » Cette phase, j’entends Jésus la prononcer comme avec des sanglots dans la voix, regrettant tellement que nous n’ayons pas l’amour de Dieu en nous, en laissant entendre par ce ton de voix comme notre vie serait différente si nous avions l’amour de Dieu en nous. Je n’en dis pas plus, je vous laisse continuer la méditation.

Quant à la 1° lecture, surtout lue dans le contexte où nous sommes, elle mérite quelques explications. Pourquoi trouve-t-on dans la Bible des paroles comme celles que nous avons entendues ? Pourquoi Dieu prononce-t-il de telles paroles, parce que c’est lui et non Moïse qui les prononce ! « Maintenant, dit Dieu, laisse-moi faire ; ma colère va s’enflammer contre eux et je vais les exterminer ! » C’est terrible parce que, dans ce texte, on a l’impression que les rôles sont inversés : le grand méchant, c’est Dieu et le très gentil qui finira par l’amadouer grâce à son intercession, c’est Moïse ! Comment comprendre ?

D’abord un mot sur la colère de Dieu. Parce que, quand même, la colère est l’un des 7 péchés capitaux ! Quand il y a une expression que nous ne comprenons pas, il y a une règle d’interprétation absolue qui, en plus, marche à tous les coups, c’est donc bon de la connaître. On pourra l’appliquer à la jalousie de Dieu, à la vengeance, au jugement …

Devant ces expressions qui, appliquées à Dieu, provoquent un malaise, il faut toujours nous demander : à quoi peut ressembler la colère, la jalousie, la vengeance, le jugement chez quelqu’un qui n’est qu’amour. Parce que, ce qui définit Dieu, c’est qu’il est amour et Dieu n’est pas, comme nous, sujet au changement. C’est pourquoi le père Varillon aimait dire que c’était trop peu de dire : Dieu est amour, il aimait préciser : Dieu n’est qu’amour. 

Alors, puisqu’il est question de colère dans notre texte comment peut s’exprimer la colère chez quelqu’un qui n’est qu’amour ? Vous ferez vous-même le travail avec les autres mots ! Pour le comprendre, je vous propose cet exemple. Imaginez des parents qui perdent un de leurs enfants dans un accident causé par un chauffard complètement ivre. Leur colère peut s’exprimer de deux manières différentes : soit ils se mettent à militer pour le rétablissement de la peine de mort pour ce type de chauffard, soit ils deviennent militants dans une association qui lutte contre l’alcool pour que d’autres parents n’aient pas à vivre le même drame qu’eux. Evidemment, Dieu appartient à cette deuxième catégorie, sa colère n’est jamais dirigée contre le pécheur, mais contre le péché. Ce qu’il veut, c’est éliminer, non pas les hommes, mais tout ce qui pourrait conduire les hommes au péché.

Peutr-être trouvez-vous l’explication intéressante, mais vous pourriez me répondre que ce n’était pas le sens de la phrase que j’ai déjà citée : « Maintenant, dit Dieu, laisse-moi faire ; ma colère va s’enflammer contre eux et je vais les exterminer ! » Oui, j’en conviens, mais nous sommes dans le livre de l’Exode et il nous faut accepter que ce n’est que le début de la Révélation, une Révélation qui va préciser peu à peu le vrai visage de Dieu, une révélation qui ne sera plénière qu’avec la venue de Jésus qui parlera de Dieu comme d’un Père aux qualités inimaginables. 

Vous connaissez la boutade de Voltaire qui disait : « Dieu a créé l’homme à son image et l’homme le lui a bien rendu. » Oui, c’est vrai que, souvent, quand l’homme parle de Dieu, il en parle en le décrivant comme un être suprême qui lui ressemblerait. C’est un peu ce dont témoignent les premiers textes de la Bible et il ne faut pas les accuser de ne pas avoir compris ce que des siècles de révélation vont préciser, affiner.

Si je résume, face à ces expressions difficiles, il faut deux réflexes : 1/ accepter que la révélation soit progressive et donc connaître à peu près l’époque de rédaction des textes pour comprendre où on en est de la Révélation 2/ Réinterpréter ces expressions en se demandant ce qu’elles veulent dire appliquées à quelqu’un qui n’est qu’amour.

Du coup, nous pouvons mieux comprendre le sens de ces textes qui nous parlent de l’intercession des hommes cherchant à influencer Dieu pour qu’il change d’avis. C’est bien le cas de ce texte où Moïse semble arracher in extremis que Dieu n’extermine pas son peuple ; c’était aussi le cas du texte racontant le marchandage d’Abraham avec Dieu pour essayer de sauver Sodome. Moi, je crois que la plus grande leçon de ces textes ne concerne pas Dieu, parce que Dieu n’est qu’amour et qu’il est sans changement, mais la plus grande leçon, elle concerne les hommes. Ces textes marquent déjà un véritable progrès de la révélation au moins su deux points. D’abord, ils nous montrent des hommes qui dialoguent sans crainte avec Dieu, parlant à Dieu, selon la belle expression biblique, « comme un ami parle à un ami. » 

C’est vraiment beau et totalement nouveau pour l’époque qui ne pouvait pas imaginer une telle familiarité entre Dieu et les hommes.  Et, ensuite, ils nous montrent des hommes totalement solidaires de leurs frères, prêts à tout pour les garder en vie. Là encore, quel progrès dans la mentalité de l’époque qui était plutôt bien décrite par la réflexion de Caïn disant : suis-je le gardien de mon frère ?

Mesurons-nous vraiment la chance que nous avons d’arriver à ce moment de la Révélation ? Profitons-nous vraiment de ce qu’il nous a été donné d’apprendre pour vivre encore plus dans la familiarité avec Dieu et la fraternité vis-à-vis des autres hommes ?

Cette publication a un commentaire

  1. wilhelm richard

    je peux dire que votre homélie aujourd’hui n’est vraiment ma tasse de thé ! ce n’est pas très mélodieux ….
    Wollten Sie ein Kaffee mit ein oder zwei Zucker ? c’est plus doux, n’est-ce pas ?
    Um wieviel Uhr môchten Sie trinken ?

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