7 juin : lundi 10° semaine Temps Ordinaire. Quel bonheur que de posséder 2 portraits authentiques de Jésus !

Est-ce qu’il vous est déjà arrivé de regretter que personne n’ait eu l’idée de peindre le portrait de Jésus ? Ça aurait pu être possible, les artistes ne manquaient pas à cette époque ! Mais voilà, personne n’y a pensé et c’est bien dommage. Pourtant, si nous n’avons pas de portrait réalisé avec de la peinture pour nous représenter les traits du visage de Jésus, nous avons au moins deux portraits réalisés avec des mots qui nous permettent de nous représenter avec une justesse incroyable la personne de Jésus. L’un de ces portraits se trouve dans une lettre de Paul et c’est l’hymne à l’amour de la 1° épître aux Corinthiens. Fermez les yeux, écoutez le texte, les 16 qualités de l’amour nous brossent l’un des portraits les plus fidèles de Jésus. Et l’autre portrait, vous l’avez deviné, c’est l’Evangile d’aujourd’hui, l’Evangile si connu des Batitudes.

Ce texte est sûrement l’un des plus connus de l’Evangile et le plus admiré par les non-chrétiens qui ont eu la curiosité de lire les Evangiles. On sait, par exemple, que Gandhi s’en est largement inspiré pour établir la charte de vie dans son ashram. Je le cite : « A mesure qu’augmentait mon contact avec les vrais chrétiens, je vis que le Sermon sur la montagne était tout le christianisme pour qui veut vivre la vie chrétienne. C’est le sermon qui m’a fait aimer Jésus ». Mais hélas, cette merveilleuse déclaration de Gandhi va devenir, en même temps, le début d’un véritable drame … je m’explique !

Ghandi a pu prendre les Béatitudes comme charte de vie parce qu’il avait une grandeur d’âme assez impressionnante. Il faisait partie de ces rares personnalités capables de mettre le bien des autres, l’amour comme l’unique objectif de leur vie et de s’y tenir dans les choix qu’ils faisaient au quotidien. Dans l’histoire, on connait peu de personnes qui en ont été capables, personnellement, il y a aussi la figure de Nelson Mandela qui m’impressionne beaucoup. Pour lui aussi, on peut dire que les béatitudes ont été une charte de vie même si je ne suis pas sûr qu’il s’y soit référé explicitement car il avait une foi discrète. Evidemment, je ne me permettrai pas de critiquer Gandhi qui l’a fait ! Mais j’interroge ceux qui, à sa suite, surtout chez les chrétiens, veulent transformer ce texte en une charte. Parce que, si les Béatitudes sont une charte, alors elles sont réservées à une toute petite élite morale de l’humanité qui seule serait capable de les vivre.

Or Jésus n’a pas prononcé ce discours pour une élite. Le début du texte est suffisamment explicite : « Voyant les foules, Jésus gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent de lui. Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait. » Qui Jésus a-t-il devant les yeux quand il prononce ces paroles ? Pour qui les prononce-t-il ? Pour les foules qui le suivent et les disciples. En feuilletant les Evangiles, on se rend vite compte que ce n’est pas l’élite de l’humanité ! Les foules qui suivent Jésus, elles étaient composées de personnes handicapées, de publicains, de prostituées, de braves gens qui ne trouvaient pas leur place dans la société. L’élite de la société ou du moins ceux qui se considéraient comme appartenant à l’élite refusaient de l’écouter ou l’écoutaient pour le piéger par la suite. Quant aux apôtres, leurs réactions si souvent décalées nous prouvent bien qu’ils ne représentaient pas l’élite de l’humanité ! C’est donc bien clair, Jésus ne parlait pas pour une élite morale de l’humanité en prononçant les Béatitudes.

Qu’est-ce que ça change de considérer les béatitudes plutôt comme le portait de Jésus et non comme une charte de vie. Eh bien, ça change tout ! Une charte, c’est un programme à vivre, un peu comme la loi chez les juifs. Mais on sait ce que Paul, le juif et qui restera juif jusqu’au bout, va dire de la loi. Dans l’épitre aux Romains, il dira que la loi sert à souligner le péché. C’est-à-dire que la loi dit parfaitement tout ce qu’il faut faire mais ne donne pas la force de l’accomplir. Du coup, en me référant à la Loi, je suis vite déprimé en constatant tout ce que je ne fais pas et qu’il faudrait justement que je fasse pour être un véritable croyant. La charte fonctionne ainsi et si les béatitudes sont une charte, je suis continuellement pris en défaut moi qui ne suis pas assez pauvre, doux, miséricordieux, affamé de justice …

Par contre, si les Béatitudes sont un portait de Jésus, ça veut dire que le mieux, le plus simple, le plus efficace pour les appliquer, pour les vivre, ce n’est pas de faire des efforts, c’est d’accueillir Jésus. D’abord, j’espère que vous êtes bien d’accord pour dire que c’est un portait de Jésus. Il est bien le seul qui réalise en tout point ce que disent les Béatitudes. En les prononçant, c’est comme un témoignage de vie que nous livre Jésus. Il nous dit : voilà ce qui me rend heureux d’un bonheur que nul ne pourra jamais me ravir. Du coup, nous sentons bien que ce chemin est le seul chemin qui conduise de manière assurée au Bonheur. Mais, voilà, nous n’avons pas la grandeur d’âme de Gandhi, du moins, moi, je n’ai pas la grandeur d’âme de Gandhi. Alors, est-ce que je vais déprimer en voyant le chemin que Jésus trace pour que je sois heureux et en constatant que je n’ai pas la force de le prendre ? 

Non ! Puisque les béatitudes sont le portait de Jésus, il me faut ressembler à Jésus pour vivre de ce bonheur. Mais attention, ce n’est pas avec des efforts qu’on ressemble à Jésus. Vous m’avez déjà entendu dire que je suis contre la religion des efforts qui s’assimile à une religion de la transpiration, une religion qui n’attire personne au contraire ! On ne peut pas dire que le parfum de la transpiration soit attirant ! Alors, comment ressembler à Jésus ? Hier, nous avons célébré la fête du Saint-Sacrement qui nous redisait l’importance de l’Eucharistie. Eh bien, c’est en le recevant et en le laissant faire son œuvre que, peu à peu, nous lui ressemblerons et que nous deviendrons donc capables de vivre les Béatitudes, c’est-à-dire de parvenir à ce Bonheur que nul ne pourra nous ravir puisqu’il ne repose pas sur de l’avoir mais sur une qualité d’être et d’être en relation. 

Pour me préparer à la fête d’hier, je relisais les prédications que le père Cantalamessa avaient donné en 2004-2005 sur ce thème de l’Eucharistie. Et j’ai été touché par cette image qu’il donne. Il rappelle la ruse de Jacob qui, en se recouvrant d’une peau de bête, va obtenir la bénédiction de son père en se faisant passer pour son frère Esaü qui était très velu. Il a utilisé une ruse pour obtenir cette bénédiction, eh bien, dit le père Cantalamessa, il se passe quelque chose de semblable quand nous nous présentons au Père céleste après avoir communié, il nous prend pour son Fils unique et nous bénit largement ! Voilà comment ressembler à Jésus et vivre du Bonheur des Béatitudes. 

Pour être tout à fait honnête et ne pas être accusé de publicité mensongère, il y a quand même un effort à faire pour que ça marche ! Mais je précise tout de suite qu’il n’y a qu’un seul effort à faire, pas 36 000 ! Et puisque j’ai décidé d’être vrai, il faut aussi que je rajoute que cet effort durera toute la vie : c’est de rester fidèle à la participation à l’Eucharistie et à l’adoration eucharistique qui en est son prolongement. Parce que, dès que je m’en éloigne ou que je ne les vis plus avec foi, les traits du visage de Jésus qui étaient devenus les miens s’effacent assez vite et je redeviens moi-même avec toutes mes lourdeurs.

Je n’ai plus beaucoup de temps pour parler de la si belle 1° lecture que nous avons entendue qui nous livre un précieux secret : comment réconforter les autres ? Comment le réconfort que nous voulons apporter aux autres peut-il être bienfaisant ? Eh bien, dit Paul, c’est en accueillant le réconfort que Dieu nous apporte quand nous sommes dans la détresse. Ce qui suppose que nous acceptions de reconnaître que nous traversons des moments de détresse. Le frère Adrien Candard dit que l’un des drames de la prière, c’est que, trop souvent, nous envoyons quelqu’un d’autre prier à notre place ! Nous envoyons, dit-il, une statue de plâtre prier à notre place, la statue du saint que nous aimerions devenir ! Mais Dieu n’aime pas les statues de plâtre, ce qu’il aime ce sont les hommes et les femmes au cœur de chair même et surtout quand ce cœur est cabossé et qu’il nous fait produire des trucs pas brillants. Si, dans ces moments-là, comme chez Mac Do, nous osons venir devant le Seigneur tels que nous sommes, alors il nous apportera le réconfort. Et son réconfort sera tellement XXXL qu’il sera bien trop grand pour nous, du coup, il en restera forcément pour les autres et c’est avec ce réconfort divin que nous deviendrons capables de nous réconforter les uns les autres, sans nous blesser, même dans les pires moments.

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