9 décembre : Quand Jésus se soucie de nous procurer le repos.

Ce texte d’évangile, il a pour moi une saveur particulière. Dans mon cheminement que je vous ai partagé, il y a eu ce moment où je me sentais épuisé, vidé, alors que je n’étais prêtre que depuis 6 ans. Alors, ce texte d’Evangile, il a souvent résonné pour moi : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. » Oui, comme je peinais vraiment sous le poids du fardeau, j’étais très sensible à cette promesse de Jésus de m’offrir le repos. Mais, je vous avoue que la suite du texte m’a résisté assez longtemps, je n’arrivais pas à comprendre ce que Jésus voulait dire quand il expliquait comment trouver le repos : « Prenez sur vous mon joug. » 

Pour moi, le joug, ça n’évoquait pas du tout le repos mais au contraire le labeur et un labeur difficile même éreintant. J’étais trop jeune pour avoir vu des bœufs labourer, chez nous les tracteurs étaient déjà arrivés quand j’étais enfant, mais j’avais vu un poster-photo représentant une paire de bœufs, attelés par un joug. Et ce poster m’avait beaucoup marqué parce qu’on voyait tous les muscles des bœufs en action pour tirer le soc de la charrue qui s’enfonçait profondément en terre. Alors, je me disais : si c’est ça le repos que Jésus propose, non merci ! Moi, j’étais fatigué et, avec cette image du joug, j’avais l’impression que Jésus me demandait d’en faire encore plus. Je ne comprenais vraiment pas pourquoi Jésus expliquait que je pourrais trouver le repos en prenant son joug.

Mais régulièrement, je revenais sur cette parole ou plutôt cette parole revenait en moi comme pour me dire que, ce que je cherchais, ce dont je rêvais, était vraiment caché dans cette parole. Alors, je demandais au Saint-Esprit de m’éclairer, de m’aider à comprendre le sens profond de cette parole, de me révéler comment le joug pouvait procurer le repos auquel j’aspirais. Et un jour la lumière est venue, je ne sais plus comment elle est venue, mais elle est venue ! Je ne sais plus si j’ai lu ou entendu un commentaire qui m’a éclairé ou si c’est l’Esprit-Saint, lui-même, qui m’a éclairé directement, mais la lumière est venue et, aujourd’hui encore, je bénis le Seigneur pour cette lumière qu’il m’a donnée car elle éclaire encore ma vie, même si, comme chacun d’entre nous, je peux toujours progresser en fidélité.

La lumière qui m’a été donnée m’a permis de comprendre que le joug, c’était cette pièce de bois qui permettait d’atteler deux bœufs pour qu’ils puissent tirer ensemble. Un seul bœuf s’épuiserait à tirer la charrue, mais à deux ils y arrivent. Eh bien, j’ai compris que c’était Jésus qui me suppliait : viens à moi, prends mon joug, c’est-à-dire accepte-moi à tes côtés, laisse-moi tirer avec toi, porter avec toi, ce qui serait trop lourd pour toi si tu restais seul. Et voilà, je comprenais subitement que j’étais parti, tête baissée dans le ministère, en oubliant de prendre et de garder Jésus à mes côtés, chaque instant. Je m’étais donné très généreusement sans compter ma peine, sans chercher à me ménager, sans prendre beaucoup de repos.

Et, moi, je pensais que tout cela faisait plaisir au Seigneur, qu’il se réjouissait d’avoir un serviteur aussi travailleur ! Mais loin de le réjouir, ça lui faisait plutôt du souci de me voir me dépenser de cette manière. Mais il m’a laissé faire pour que je comprenne. Il fallait cet épuisement physique, moral spirituel pour que je m’interroge en profondeur sur ce qui n’allait pas, sur ce qui n’allait plus. Et, grâce à cette parole de l’Evangile, j’ai compris que j’avais perdu de vue que c’était la mission du Seigneur que je servais et qu’il fallait donc qu’à tout instant, il soit avec moi pour m’aider, me guider, m’inspirer.

Comme je vous l’ai partagé, c’est à ce moment que j’ai eu la grâce de participer à cette retraite de prêtres à Ars, retraite au cours de laquelle le Seigneur m’a profondément renouvelé. Encore une fois, j’ai bien conscience que je peux toujours progresser pour demeurer plus fidèle à ce que le Seigneur m’a donné de comprendre, mais ce que j’ai compris, c’est ce que j’ai le plus envie de partager : ceux qui prennent le Seigneur à leurs côtés, ceux qui prennent son joug, ils ne s’épuiseront plus. Attention, ça ne veut pas dire que si on prend son joug, on ne connaitra plus de difficultés, non ! Mais ça veut dire qu’aucune difficulté ne nous écrasera puisqu’il porte avec nous ce qui pourrait nous écraser si nous étions seuls à le porter.

Et je peux dire que tout cela a considérablement changé ma manière d’envisager la foi et donc a changé aussi le contenu de ma prédication. Avoir la foi, ce n’est pas faire de bonnes œuvres, du moins, ce n’est pas cela qui caractérise le croyant car il y a des incroyants qui font de très bonnes œuvres. Non, avoir la foi, c’est prendre et garder Jésus à nos côtés pour tout faire avec lui, pour ne plus rien décider sans lui. Le chrétien, c’est celui qui prend et garde le Christ à ses côtés, c’est le sens-même du mot chrétien. Alors, évidemment, avec Jésus, je vais faire du bien, je vais vivre dans l’amour, mais ce bien que je vais faire ce n’est pas ce qui me caractérise comme chrétien. Ce qui me caractérise, c’est que je ne fais rien sans Jésus et tout ce qui est fait avec Jésus a une fécondité tellement plus grande que tout ce que je peux faire pour Jésus !

Avec tout ce que je viens de dire, les derniers versets da la 1° lecture résonnent de manière savoureuse : « Le Seigneur rend des forces à l’homme fatigué, il augmente la vigueur de celui qui est faible. Les garçons se fatiguent, se lassent, et les jeunes gens ne cessent de trébucher, mais ceux qui mettent leur espérance dans le Seigneur trouvent des forces nouvelles ; ils déploient comme des ailes d’aigles, ils courent sans se lasser, ils marchent sans se fatiguer. » Oui, voilà ce que le Seigneur promet à tous ceux qui prendront son joug, à tous ceux qui le garderont à leurs côtés : « Le Seigneur rendra des forces à l’homme fatigué, il augmentera la vigueur de celui qui est faible. Ils trouveront sans cesse des forces nouvelles ; ils déploieront toutes leurs potentialités comme les ailes d’un aigle peuvent se déployer, ils pourront courrir sans se lasser, et marcher sans se fatiguer. » Alors que ceux qui sont, certes généreux, mais qui ne gardent pas le Seigneur à leurs côtés, ceux qui ne prennent pas son joug, eh bien, eux, « ils se fatiguent, se lassent, et ne cessent de trébucher. » Nous sommes dans le temps de l’Avent qui nous prépare à ce grand mystère de l’Incarnation qui nous dit que le Seigneur veut venir parmi nous pour que nous ne nous épuisions plus à tirer, porter seul ce qui est trop lourd pour nous. Il est venu, il ne cesse de venir, le prendrons-nous, le garderons-nous à nos côtés ? C’est à nous de choisir !

Dans la partie du journal de Marthe que je lisais hier, je suis tombé sur cette prière de Marthe que nous pourrions reprendre à notre compte particulièrement au lendemain de la fête de l’Immaculée Conception  : « Ô ma Mère, demandez bien à Jésus d’habiter en moi, près de moi, avec moi, toujours, avec le Père et le Saint-Esprit ! Faites de moi une âme eucharistique. »

Cette publication a un commentaire

  1. wilhelm richard

    pour résumer, nous pourrions dire tout simplement :

    JOUG CONTRE JOUE (avec le Seigneur, bien entendu !!!)

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