20 février : mardi 1° semaine de carême. Puissance de la Parole, puissance de la prière … quand nous ne rabâchons pas !

Elle est puissante la Parole du Seigneur ! J’espère que nous avons déjà tous fait cette expérience d’entendre ou de lire une Parole venant des Ecritures et qui nous touche en plein cœur comme si elle avait été écrite spécialement pour nous afin de nous rejoindre dans le moment précis que nous vivons. C’est de cette puissance qu’Isaïe nous parlait dans la 1° lecture qui portait un regard de foi précisément sur la puissance de la Parole du Seigneur qui, telle la pluie ne remontera pas au ciel sans avoir, auparavant, accomplie son action bienfaisante. Pour désigner cette action bienfaisante, Isaïe va décrire 3 actions de la pluie qui nous parlent de la manière dont la Parole agit en nous : abreuver, féconder et faire germer. Je m’arrête quelques instants sur chacune de ces 3 actions.

  • La pluie vient abreuver ou désaltérer la terre. Pour bien comprendre cette image, il faut se rappeler qu’au pays d’Isaïe, il ne pleut pas toute l’année, loin s’en faut. La sécheresse est donc assez longue et régulière, mais la pluie a fait son travail au moment où il le fallait et la terre a les ressources nécessaires si on ne la surexploite pas. En comparant la Parole à la pluie qui abreuve la terre, c’est donc comme si Isaïe nous disait de ne pas trop nous inquiéter pour nos périodes de sécheresse. En son temps, le Seigneur avait fait ce qu’il fallait en nous donnant sa Parole qui nous assure les ressources nécessaires pour traverser nos moments de sécheresse.
  • La pluie vient féconder la terre. La pluie qui tombe est chargée de très bonnes propriétés, enfin, c’était surtout vrai au temps d’Isaïe car, aujourd’hui, en tombant, elle se charge de tout ce qui pollue l’atmosphère ! Si donc la Parole est comparée à la pluie, c’est le signe qu’elle aura des effets extrêmement bienfaisants si nous l’écoutons avec attention ou si nous la lisons avec notre intelligence pour la comprendre afin que notre âme puisse s’en délecter et qu’elle permette à nos cœurs de prendre les bonnes décisions. Car, dans la Bible, le cœur n’est pas d’abord le centre des émotions mais le centre des décisions. Laissons donc la Parole circuler dans tout notre être, c’est en circulant qu’elle accomplit son œuvre car elle possède tant de bonnes vertus.
  • Enfin la pluie vient faire germer. Pour les deux actions précédentes abreuver et féconder, la pluie se suffisait à elle-même. En pénétrant dans la terre, elle devenait capable, quelle que soit la terre de l’abreuver et de la féconder. Cette 3° action présuppose que la terre ait été ensemencée. Elle ne pourra faire germer que ce qui a été déposé dans la terre. Ainsi donc, le travail de la Parole de Dieu sera de venir visiter ce qui est positif en nous, nos qualités, nos désirs. Tout ce que la Parole va rencontrer sur son chemin dans sa circulation en nous se trouvera donc comme bonifié. C’est sans doute une invitation, en ce temps de carême à ne pas nous focaliser seulement sur ce qui va mal, sur ce qui est à changer en nous ; mais aussi et peut-être surtout à présenter au travail bienfaisant de la Parole toutes nos potentialités. 

Et, comme Isaïe pose un regard de foi sur la puissance de la Parole, il peut déjà se projeter dans l’avenir en contemplant les effets de la Parole chez celui qui la reçoit. Après l’avoir abreuvé, fécondé, après avoir fait germer ce que contient son cœur, la Parole lui donnera de pouvoir devenir nourrissant. Ce que dira cette personne, ce ne seront plus des paroles creuses, ce que fera cette personne, ce ne seront plus des actions vides de sens. Voilà, s’il en était besoin, un texte qui peut soutenir un bel effort de carême qui consisterait à donner plus de place à la Parole de Dieu dans nos journées.

Venons-en à l’Evangile. Nous avons tous entendu ou lu des dizaines et des dizaines de commentaires sur le Notre Père, je ne veux donc pas en rajouter un de plus ! Je ferai 2 remarques.

  • Jésus, lui, dans sa prière, il n’avait pas besoin de tous les mots du Notre Père. C’est évident, il n’avait pas besoin de dire : pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons.

Mais, c’est sûr que, parmi tous les mots de cette prière qu’il nous a donnée, il y a des mots que Jésus utilisait pour sa propre prière. Le 1° mot de la prière, « Abba », c’est sûr, Jésus le disait. Ce mot, passant et repassant de son cœur à ses lèvres devait même constituer l’essentiel de sa prière. C’est vrai qu’à cet endroit du Notre Père, les manuscrits n’ont pas gardé le mot araméen Abba. Mais les exégètes sont formels : dans les 170 emplois du mot de Père que l’on trouve dans la bouche de Jésus, c’était bien ce mot de Abba qu’il utilisait habituellement.

Et ce qui est beau, c’est qu’en nous invitant à utiliser ce même d’« Abba » qu’il utilisait, Jésus nous donne un moyen de guérir de toutes les blessures que nous pouvons garder d’une paternité humaine mal ajustée ou en tout cas d’une paternité qui ne nous aura pas apporté ce que nous aurions aimé recevoir. Prions sans rabâcher, n’hésitons pas à passer et repasser dans notre cœur ce mot de « Abba », puisqu’il porte en lui un extraordinaire pouvoir de guérison.

  • La 2° remarque, c’est à l’une des catéchèses du pape François sur le Notre Père que je l’emprunte. Je le cite parce qu’il avait bien su manier le suspens ! Il y a une absence frappante dans le texte du « Notre Père ». Si je vous demandais quelle est cette absence frappante, il ne serait pas facile de répondre. Il manque un mot. Réfléchissez tous : quel mot est absent du « Notre Père » ? Un mot dont chacun de nous fait grand cas. J’arrête la citation ! Avez-vous trouvé ce mot qui manque et dont nous faisons grand cas ? Voici la réponse qu’il donnait à la suite de sa question : Pour gagner du temps, je vais vous le dire : il manque le mot : « je ». On ne dit jamais « je. » C’est tellement beau ! Ça signifie que, de même que dire et redire Abba, peut nous guérir des blessures d’une paternité peu ajustée, de la même manière dire et redire le Notre Père peut nous guérir d’un individualisme exacerbé et d’une fraternité dévoyée.

Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons la grâce de ne pas rabâcher quand nous prions afin que notre prière puisse porter de beaux fruits.

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