On peut dire qu’il y a 3 figures bibliques qui nous accompagnent chaque année au long du temps de l’Avent : la figure du prophète Isaïe qui a annoncé le Messie, la figure du précurseur, Jean-Baptiste qui a montré le Messie et la figure de Marie qui a porté le Messie. Après avoir bénéficié, depuis l’entrée en Avent, des enseignements du prophète Isaïe, c’est sur la figure de Jean-Baptiste que la liturgie d’aujourd’hui nous fait méditer.
Certes, la 1° lecture ne nous parlait pas de Jean-Baptiste mais d’Elie et dans l’Evangile, c’est encore la figure d’Elie qui ouvrait le texte avec cette question que posaient les apôtres concernant le retour d’Elie. Mais, à la fin du texte, l’évangéliste nous donne une clé de compréhension très importante en nous indiquant que Jésus, en parlant d’Elie, parlait, en fait de Jean-Baptiste. Alors essayons de démêler tout cela pour comprendre le lien qu’il peut y avoir entre Elie et Jean-Baptiste et voyons en quoi tout cela peut nous stimuler pour vivre cette 2° partie du temps de l’Avent dans laquelle nous entrons.
Le prophète Elie a eu une place très importante parmi les prophètes. Nous connaissons tous son fameux coup d’éclat, rapporté dans une grande mise en scène qui lui permettra de manifester, face à tous les prêtres de Baal, que Dieu, son Dieu est le Dieu véritable. Finalement, ça sera ça l’axe essentiel du ministère d’Elie : montrer, on pourrait presque dire démontrer que Dieu est le vrai Dieu. Dans le contexte de l’époque, c’était important puisqu’on sait que le roi Achab avait épousé une princesse païenne, Jézabel, qui avait amené avec elle, ses divinités, les Baals et ses prêtres.
Nous avons entendu cette très belle relecture du ministère d’Elie qui a été faite par Ben Sirac le Sage dans la 1° lecture. Mais cette relecture a surtout voulu insister sur cet épisode étonnant concernant la fin de son ministère. En effet, Elie ne va pas mourir puisqu’il sera emporté auprès du Seigneur sur un char de feu. La tradition rabbinique en conclura que s’il n’est pas mort, c’est parce qu’il reviendra inaugurer les temps nouveaux. C’est ce que suggère la question des apôtres, telle qu’elle est formulée dans l’Evangile que nous avons entendu.
Evidemment, en entendant cela, on ne peut pas ne pas repenser à l’épisode de la Transfiguration, dans lequel Elie s’est rendu présent pour entourer Jésus avec Moïse, qui lui non plus, dans la tradition rabbinique, n’est pas mort mais aurait été enlevé au ciel dans un baiser de Dieu. Donc si Elie a manifesté sa présence sur le Mont Thabor, c’est le signe que les temps nouveaux est commencé. Oui, avec Jésus les temps nouveaux ont commencé, l’Ancienne Alliance a été accomplie et nous sommes entrés dans le temps de la nouvelle Alliance. Avec Jésus, du nouveau, du radicalement nouveau a commencé. C’est pour cela que ces jours j’ai tant insisté pour dire que ce qui caractérisait un chrétien ce n’était pas de faire le bien et de refuser le mal. Cela l’Ancienne Alliance le demandait déjà. Non, ce qui caractérise les temps nouveaux inaugurés par Jésus, là encore je l’ai dit, c’est que Jésus ne se contente pas de dire ce qu’il faut faire, mais il donne la force de l’accomplir. Et, cette force, il la fera reposer sur ses apôtres et sur tous les chrétiens de tous les temps en donnant le Saint-Esprit. Mentionner cela nous tourne déjà vers la retraite que nous vivrons ensemble la semaine prochaine avec ce très beau thème : avec le St Esprit, tout devient possible.
Très vite, et déjà de son vivant, le ministère de Jean-Baptiste va être relu comme étant dans la ligne de celui d’Elie, ces deux prophètes au tempérament de feu seront désormais associés. On va se mettre à dire de Jean-Baptiste ce qu’on disait d’Elie. Le prophète Malachie, dans les deux derniers versets du dernier livre du Premier Testament, annonçait le retour d’Elie en ces termes : « Voici que je vais vous envoyer Élie le prophète, avant que vienne le jour du Seigneur, jour grand et redoutable. Il ramènera le cœur des pères vers leurs fils, et le cœur des fils vers leurs pères, pour que je ne vienne pas frapper d’anathème le pays ! » Or cette prophétie concernant Elie, elle sera appliquée mot pour mot à Jean-Baptiste, c’est ce que dit l’Ange à Zacharie quand il lui annonce la naissance de son fils, je vous rappelle ces paroles : « Il marchera devant, en présence du Seigneur, avec l’esprit et la puissance du prophète Élie, pour faire revenir le cœur des pères vers leurs enfants, ramener les rebelles à la sagesse des justes, et préparer au Seigneur un peuple bien disposé. »
A cause de toutes ces similitudes entre Jean-Baptiste et Elie, il n’est pas étonnant que certains aient posé la question à Jean-Baptiste, lui-même : es-tu Elie qui doit venir ? Et vous l’aurez compris, cette question était importante puisque le retour d’Elie devait marquer l’inauguration des temps nouveaux. A cette question, Jean-Baptiste répondra qu’il n’est pas Elie. Et il a raison, il n’est pas Elie, il est Jean-Baptiste ! Malgré tout, Jésus dira quand même que la manière dont Jean-Baptiste accomplit son ministère correspondait très bien à ce qui devait se passer au retour d’Elie.
Vous savez peut-être d’ailleurs que les adeptes de la doctrine de la réincarnation ont fait de cette réponse de Jésus la preuve que, Jésus lui-même, croyait en la réincarnation en affirmant que Jean-Baptiste était la réincarnation d’Elie. Evidemment, c’est ridicule ! Non, ce que Jésus a voulu dire, c’est que, dans la personne de Jean-Baptiste, il y avait suffisamment de ressemblance avec ce que devait faire Elie à son retour pour que le peuple puisse reconnaître qu’il était temps de se convertir. Puisque les derniers temps, les temps nouveaux ont commencé, il est urgent de se convertir. Je paraphrase la déclaration de Jésus qui disait : « à vin nouveau outres nouvelles » en disant : « à temps nouveaux, comportements nouveaux, foi renouvelée… »
Si jamais ce parallèle entre Elie et Jean-Baptiste vous a paru un peu compliqué, retenez au moins que, dans cet évangile, Jésus adresse un vif reproche aux scribbes, à tous ceux qui s’enorgueillissaient d’être les spécialistes de l’Ecriture. Il leur reproche de ne pas avoir su lire les signes des temps qui leur montraient qu’avec lui, les Ecritures étaient en train de s’accomplir. Il leur reproche de ne pas s’être convertis et même plus grave de s’être endurcis puisqu’ils le conduiront à la mort.
Nous avançons dans ce temps de l’Avent et nous entendons chaque jour dans les lectures, des promesses, mais des promesses qui ne seront effectives que pour ceux qui se convertissent comme je le disais hier en parlant de la fatigue de Dieu. Ne soyons pas comme les scribbes, ne nous contentons pas de connaitre les Ecritures, de les écouter sans répondre à l’appel qu’elles nous lancent quotidiennement d’entrer dans une foi renouvelée, dans un comportement renouvelé.
Amen !
Oui, tendez-leur donc la perche à vos auditeurs sénégalais… 🙂
Bon dimanche P. Hébert!