13 août : Dieu est contre le permis à point !

En méditant sur ce texte d’Evangile, une idée m’est venue que je n’avais jamais eue jusqu’à maintenant. En effet, quand j’entendais la question de Pierre sur le nombre de fois qu’il faut accorder son pardon, j’avais toujours pensé que Pierre voulait vérifier s’il était suffisamment miséricordieux. Je ne sais pas combien de fois, il avait l’habitude de pardonner, peut-être avait-il écouté l’enseignements des rabbins qui disaient qu’il fallait pardonner 3 fois, lui, dans sa générosité, il monte le curseur et propose 7 et il veut vérifier auprès de Jésus si c’est assez. 

Mais en méditant ce texte j’ai été traversé par cette idée que Pierre voulait peut-être vérifier s’il n’en faisait pas trop ! Puisque les rabbins disaient 3, est-ce que 7, ça n’est pas trop ? En continuant la méditation, je me suis dit que cette interprétation pourrait aussi nous rejoindre. Parce que je pense qu’il nous arrive certaines fois de nous demander si nous n’en faisons pas un peu trop avec certaines personnes. On entend d’ailleurs très souvent des gens qui disent : « Bon et bête ça commence par la même lettre ! » D’autres préfèrent plutôt jouer avec la rime, mais comme on est au sanctuaire, je ne me permettrai pas de rapporter leurs propos !

Ce passage de l’Evangile que nous venons d’entendre se trouve dans le chapitre 18 de l’évangile de Matthieu qu’on appelle le chapitre de la vie communautaire. Il n’est pas étonnant que ce soit dans ce chapitre sur la vie communautaire que nous trouvions cette question de Pierre. Parce que, de fait, dès qu’on vit à plusieurs, la question du pardon se pose immédiatement, que ce soit dans une communauté, un couple ou une famille, une promotion, une co-location. Oui, ès qu’on est plusieurs, la question du pardon se pose parce que les autres sont compliqués, et, régulièrement, il nous arrive de penser : Ah si tout le monde était comme moi, il y aurait quand même moins de problèmes !!! Enfin, c’est pas sûr parce qu’il y a des jours où j’arrive difficilement à me supporter et d’ailleurs, bien souvent, ce sont ces jours-là que je suis particulièrement imbuvable pour les autres. Mais le drame, c’est que je ne m’en rends pas bien compte et quand les autres me le font remarquer, j’ai de la peine à les croire et pour bien leur montrer que ce n’est pas juste je leur brandis une liste, toujours prête dans un coin de ma tête sur leurs imperfections qui m’agacent au plus haut point ! 

Soyons donc lucides, celui qui ne s’est jamais demandé, mais vraiment jamais, s’il n’en faisait pas un peu trop avec telle personne insupportable, si telle personne impossible méritait vraiment que je lui accorde tant d’importance, que je lui donne encore et cela pour la nième fois sa chance, que celui-là ou celle-là me jette la première pierre pour avoir eu une telle pensée ! En continuant cette méditation, j’ai trouvé que la réponse de Jésus et la parabole qu’il raconte ensuite collait pas mal avec cette interprétation.

Commençons par la réponse de Jésus qui, sans hésiter, va répondre à la demande de Pierre, le nombre de pardons à donner c’est 70 fois 7 fois. 

  • D’abord une petite précision qui s’impose, ça va sans le dire, mais ça va encore mieux en le disant … avec ces 70 fois 7 fois, Jésus n’indique pas le nombre de pardons à donner dans toute une vie, mais chaque jour, vous avez bien entendu : 70 fois 7 fois par jour !
  • D’où lui est venue cette réponse 70 fois 7 fois ? Est-ce uniquement pour simplifier l’opération de calcul mental que Jésus répond 70 fois 7 fois et non pas 31 fois 16 qui, à un chouïa prêt donne le même résultat ? Vous savez que les juifs aiment jouer avec les nombres, pour décrypter la portée de certains passages de la Bible, il est important de connaître le symbolisme des nombres. C’est le cas dans la réponse de Jésus.

7 c’est un chiffre qui indique une plénitude. Je donne quelques exemples : une semaine pleine, c’est 7 jours, la création a été achevée le 7° jour. Il y a une grande année sabbatique tous les 50 ans c’est-à-dire l’année qui vient après 7 fois 7 années, cette année sabbatique marquera un nouveau départ après un cycle achevé. Au jours de leur mariage, les juifs reçoivent 7 bénédictions pour manifester que Dieu les comble de toutes les bénédictions. 

Donc 70 fois 7 fois, c’est la totalité multipliée par la totalité multipliée par 10, ou si vous préférez la totalité au carré multiplié par 10, c’est donc équivalent à l’infini. J’ai fini mon cours de maths !

Quand Pierre demande à Jésus combien de fois, il faut pardonner, Jésus se réfère à ce qu’il connait, il repense à son Père du ciel et il sait que le Père du ciel pardonne à l’infini, donc il répond à Pierre, si tu veux vivre en digne fils de ton Père du ciel, agis comme lui, ne calcule rien et pardonne à l’infini. Tu n’auras jamais trop pardonné si tu veux ressembler à ton Père du ciel puisque lui, il pardonne à l’infini sans tenir aucun compte, ni de tes péchés, ni de la miséricorde qu’il te donne gratuitement sans se lasser.

Venons-en maintenant à la petite parabole qui va permettre à Jésus, mine de rien, comme dans toutes les paraboles de délivrer un message très important. Parce que, ce que je viens de dire, on pourrait en détourner le sens, on pourrait essayer de trafiquer la réponse de Jésus pour qu’elle devienne moins percutante. OK, Dieu pardonne à l’infini, mais lui, il doit gérer le monde entier, donc c’est normal qu’il ne calcule pas, avec tout ce monde, il risquerait, même s’il est Dieu, de s’embrouiller à un moment ou à un autre ! Mais, moi, je n’ai pas à gérer le monde entier, le pardon, c’est avec ceux avec qui je vis qu’il me faut le gérer, donc, pour moi, le nombre de pardon à donner sera forcément moins élevé.

Oh non, dit Jésus, se mettre à calculer, pour le coup, c’est un très mauvais calcul ! Et c’est pour cela qu’il raconte la parabole. Parce que si tu te mets à calculer les pardons que tu donnes aux autres, Dieu se mettra aussi à calculer les pardons qu’il t’accorde et là, tu es très mal barré ! Tes « points-pardon », tu vas les perdre bien plus rapidement que tes points sur le permis ! Peut-être que certains pensent que j’exagère et qu’ils ne sont quand même pas d’aussi grands pécheurs. Voulez-vous que nous comptions ensemble le nombre de fois où le Seigneur nous a déjà accordé son pardon depuis ce matin. Au réveil, quelle a été votre première pensée ? Il n’est pas sûr que ce soit une parole de bénédiction à l’égard du Seigneur pour ce nouveau jour de grâce : oh déjà l’heure de se lever, avec la nuit que j’ai passée ! 1° pardon du Seigneur. Ensuite, vous êtes allés à la salle à manger, combien de personnes avez-vous croisé sans leur sourire d’un sourire qui vient du fond du cœur, vous allez me dire : on a nos masques, comment sourire ? Le sourire se voit dans les yeux et le Bon Dieu, il le voit de toutes façons, 2° pardon en moins d’une demi-heure ! Après à l’office ou à la louange pour les jeunes, vous étiez assis pas loin de c-quelqu’un qui chantait faux, qui ne respectait pas le rythme, qui levait les bras et ça vous énervait et s’il y avait eu un micro dans votre tête pour que tout le monde entende ce que vous pensiez de lui ou d’elle, ça n’aurait pas été glorieux, 3° pardon ! 

J’arrête là parce que je n’ai pas le temps de continuer mais en regardant de près, on à 11h30 du matin, on doit bien en être à plus d’une vingtaine de pardons reçus. Vous comprenez que je n’exagérais pas quand je disais : si tu te mets à calculer, tes « points-pardon », tu vas les perdre bien plus rapidement que tes points sur le permis ! Donc la réponse de Jésus à Pierre est claire : rassure-toi mon cher Pierre, même si tu es plus généreux que les rabbins de l’époque en proposant 7 pardons par jour, tu es loin d’être en excès de pardon !

St Augustin aimait dire : la mesure de l’amour, c’est d’aimer sans mesure ! Il savait de quoi il parlait, lui à qui Dieu avait tant pardonné.

Très bien, me direz-vous, mais comment on fait pour pardonner sans limite à ceux avec qui on vit et qui, quoiqu’on en dise, sont quand même moins bien que moi !? Oh ce n’est pas compliqué, ne va surtout pas chercher à puiser dans ton cœur la force de donner ce pardon illimité, ton cœur, il est bien trop calculateur, sélectif et parfois-même complètement vidé. Puise dans le cœur de Dieu, ce cœur qui ne calcule pas, ni avec toi, ni avec les autres. Puise dans le cœur de Jésus que tu vas recevoir dans un instant, parce que lui, tu le sais, il a un Sacré Cœur ! Qu’elles seraient belles nos familles, nos paroisses, nos communautés si chacun de nous, prenant conscience du nombre illimité de pardons qu’il a reçus, renonçait définitivement à calculer et décidait de puiser dans le cœur à l’amour illimité de son Seigneur.

Cet article a 6 commentaires

  1. Adéline

    WAWWWWW ! Merci pour le cours de cath’ en même temps que le cours de maths !!!
    Merci 70 fois 7 fois !
    (le compte est bon, ou c’est pas assez ?)
    😀

  2. Wilhelm Richard

    Tout d’abord, un lien entre l’homélie du 11 et celle du 13 : le peche mignon.
    Sinon je reste sans voix, une voie toute tracée : la conduite de Dieu en état d’ivresse, pleine d’amour et de miséricorde : à point c’est tout !
    Vous parlez aussi de  » bon et bête  » : nous pourrions remplacer la lettre B par une autre :
    La lettre D par exemple. Cela pourra parfaitement résumer l’homélie :
    DON ET DETTE

    1. Adéline

      Il est bon ce Wilhelm !!! 😉

      1. Wilhelm Richard

        Il suffisait d’y penser. Un petit cours de math car le père avait tout calculé .
        En effet, L’infini est représente par la lettre grecque DELTA. Et cette dernière est donc D pour nous. Ainsi, nous pouvons passer du B au D. La solution était dans la question.
        Histoire d’en rire un peu avec cette B.D car Dieu avant d’être amour, Il est humour.

        Message personnel : RIP Lucienne, que vous entendiez rapidement la voix de votre Seigneur en espérant qu’il n’y ait pas de problème de sono au Ciel. MERCI.

  3. Florence A

    1 an plus tard, après le passage à la Flatière, je suis ravie de vous retrouver père Hebert sur les ondes! et je vois que vous avez toujours ce bon sens terrien qui nous rassemble, et nous fait pleurer devant les yeux du Père Céleste tellement est grand son Amour! Florence, une des « chouchous de Dieu » (qui l’avait encore oubliée une Nième nouvelle fois !

  4. Anonyme

    Amen, merci encore pour ces explication

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