21 juillet : jeudi 16° semaine temps ordinaire Les paraboles, une belle manière de dire la vérité … ne pas boire l’eau croupie !

De l’Evangile que nous venons d’entendre, je ne garderai que deux points.

1/ Jésus s’explique sur son utilisation répétée des paraboles. C’est vrai qu’il aime particulièrement s’exprimer en paraboles. Il fera aussi des discours, parfois très longs, particulièrement dans l’Evangile de St Jean et aussi chez Matthieu, mais souvent, même dans ses discours il y a une ou deux paraboles. Jésus aime les paraboles pour deux raisons.

  • La première, c’est que les paraboles sont un enseignement simple. Les paraboles n’utilisent jamais des concepts philosophiques, ce sont des images, des histoires tirées de la vie de tous les jours. Mon compatriote, le curé d’Ars, parce qu’il n’était pas philosophe et parce qu’il ne parlait pas pour des philosophes aimait lui aussi utiliser des paraboles, il en inventait chaque jour de nouvelles. 
  • La deuxième raison pour laquelle Jésus aimait les paraboles, c’est qu’elles correspondaient parfaitement à son sens de la vérité et à son désir de la transmettre. Les paraboles sont des histoires simples, mais pas naïves, elles sont toujours chargées d’un sens, d’une vérité extrêmement profonde. Et le mot de parabole suggère, en lui-même, comment cette vérité sera transmise. Para-ballô en grec, c’est ce qui est jeté le long de, c’est-à-dire que c’est tout le contraire d’une vérité jetée en pleine face. 

Et cela, c’est très intéressant pour nous ! Quand nous avons quelque chose à dire à quelqu’un, quelque chose qui peut être parfaitement juste et donc nécessaire de lui dire, quelle méthode utilisons-nous ? Jetons-nous cette vérité en pleine face ? Quand nous utilisons cette méthode, sur le coup, nous pouvons penser : eh bien, ça m’a vraiment soulagé, signe qu’il fallait que je le fasse ! Et puis, quand on voit la réaction de la personne, réaction immédiate ou à plus long terme, on se rend compte, si on n’est pas totalement insensible, qu’on s’est totalement planté. Asséner des vérités en les bombardant avec un char d’assaut, ça ne peut que détruire celui ou celle qui la reçoit. Or la vérité n’est pas faite pour détruire, mais pour construire.

C’est justement l’intérêt de la parabole qui est tout l’inverse d’un char d’assaut. La parabole permet d’énoncer une vérité profonde, racontée dans une histoire qui laisse aux auditeurs le temps de l’accueillir, d’entrer dans cette vérité et de se laisser travailler par cette vérité. On dira d’ailleurs de Jésus qu’il parlait avec autorité, non pas comme les scribes et les pharisiens qui eux bombardaient la vérité avec des chars d’assaut qui détruisaient tout sur leur passage ! Jésus, lui, il parlait avec autorité, ce mot, selon son étymologie latine, nous le savons, il signifie : faire grandir. Autorité vient de « augere » qui signifie « faire grandir. » Jésus ne parlait jamais pour se faire du bien ou pire encore pour faire du mal et détruire son auditoire, il parlait pour les faire grandir dans la vérité. Et c’est pour cela qu’il affectionnait particulièrement les paraboles.

Je ne dis pas que nous devons nous parler sans arrêt en paraboles, qui risqueraient, à la longue, de devenir des énigmes indéchiffrables., d’ailleurs Jésus ne parlait pas toujours en paraboles. Je nous invite juste à réviser notre manière de parler en demandant au St Esprit qu’il nous fasse cette grâce de toujours chercher à faire grandir ceux à qui nous adressons des remarques et donc de renoncer définitivement à bombarder la vérité avec des chars d’assaut !

2/ Le 2° point que je retiens de cet Evangile, je ne fais que l’évoquer, c’est la béatitude que Jésus adressait à ses disciples, ceux d’hier et ceux d’aujourd’hui : « heureux vos yeux puisqu’ils voient, et vos oreilles puisqu’elles entendent ! » Dans nos communautés, il y a bien quelques paires d’oreilles qui ont plus de mal à entendre ou quelques paires d’yeux moins perçants. Mais ce sont des yeux et des oreilles du cœur dont parle Jésus. Et l’acuité de ces yeux, de ces oreilles ne se corrigent pas avec des lunettes ou des prothèses mais en se livrant davantage au St Esprit parce que c’est lui qui travaille au cœur de notre cœur.

Venons-en à la si belle première lecture que nous avons entendue. C’est une confidence bouleversante de la souffrance de Dieu, d’un Dieu qui reste amoureux de son peuple comme au 1° jours : « Je me souviens de la tendresse de tes jeunes années, ton amour de jeune mariée, lorsque tu me suivais au désert, dans une terre inculte. » Or cet amoureux constate que la passion, il n’y a plus que dans son cœur à lui qu’elle brûle ! Il constate que tout le monde est en train de défaillir, de dérailler qu’il n’y a pas une catégorie de son peuple bien-aimé qui reste amoureux, c’est pourquoi il égrène douloureusement les méfaits du peuple, des prêtres, des dépositaires de la loi, des pasteurs, des prophètes. Il a beau chercher, plus personne ne garde au fond de son cœur un brin d’amour pour répondre à son amour toujours aussi passionné. 

Quelle souffrance ! Dieu va mettre des mots sur sa souffrance, des mots qui montrent que, lorsque Dieu souffre, il n’agit pas comme nous. Nous, il peut nous arriver, trop souvent, de souffrir assez égoïstement. Nous voyons que notre proposition d’amour, d’amitié ne rencontre aucun écho et nous en sommes blessés, l’autre n’a pas répondu à notre attente et ce refus qui nous plonge dans la solitude nous blesse et engendre de la souffrance. J’ai envie de dire que nous, nous souffrons pour nous. Dieu, lui, il ne souffre pas pour lui, mais pour nous parce qu’il voit ce que ce refus que nous lui adressons provoque et détruit en nous. C’est ce qu’expriment magnifiquement les mots que Dieu a mis sur sa souffrance : « ils m’ont abandonné, moi, la source d’eau vive, et ils se sont creusé des citernes, des citernes fissurées qui ne retiennent pas l’eau ! »

Qu’est-ce qui fait souffrir Dieu ? Ce n’est pas tant d’être un amoureux éconduit, c’est le choix que fait le peuple qui le refuse : à l’eau vive, coulant en permanence de son cœur d’amour, le peuple préfère de l’eau croupissante qui, en plus, va se tarir car les réservoirs que les hommes se construisent sont fissurés ! Pour comprendre cette plainte, il faut se remettre dans le contexte géographique, climatique de ce pays où il peut faire très très chaud et où il manque d’eau, en permanence. Dans ce contexte, une source qui coule de manière permanente c’est un trésor qui n’a pas de prix ! Là où il n’y a pas de source, là où les sources ne sont pas sûres, les hommes creusent dans la roche avec tant d’efforts pour se construire des citernes qui retiendront l’eau de pluie. Mais cette eau de pluie accumulée n’aura jamais la saveur ni la fraicheur d’une eau de source. En plus, un jour ou l’autre avec les mouvements de terrain, cette citerne va se fissurer et n’arrivera plus du tout à retenir l’eau.

Voilà ce que Dieu constate : les hommes ne lui font plus confiance, ils estiment qu’il n’est pas une source fiable. C’est pour cela qu’ils se construisent des citernes, qu’ils vont voir ailleurs, qu’ils courent après ces idoles qui leur font de l’œil et leur adressent des promesses qu’elles sont incapables de tenir. Du coup, Dieu voit qu’en le délaissant, lui, la source de la vie, la source de l’amour, en allant boire aux eaux trompeuses que les idoles proposent, les hommes s’empoisonnent peu à peu, car cette eau devient très vite une eau croupie et qui, un jour disparaitra complètement laissant mourir de soif ceux qui ont choisi de s’y abreuver. Plus que la souffrance d’un amoureux éconduit, la souffrance de Dieu, c’est la souffrance de celui qui assiste impuissant à la descente aux enfers, à cause de ses mauvais choix, de celui ou celle qu’il aime. Imaginez-vous arrivant sur une terrasse ombragée délicieusement ventilée après une journée de marche harassante sous un soleil de plomb et que vous entendiez le serveur vous dire : alors je peux vous proposer soit de l’eau croupie, soit de l’eau fraiche de notre source, qu’est-ce que je vous sers ? J’imagine que le choix serait vite fait ! Oui, et pourtant nous nous laissons avoir si souvent en choisissant l’eau croupie !

Eh bien, c’est cela qui fait souffrir le Seigneur et c’est pour cela qu’il nous a partagé cette confidence bouleversante. Il veut nous mettre en garde pour que nous ne tombions pas dans le piège ou pour que nous puissions rectifier le tir si nous sommes déjà tombés dans le piège en faisant le choix de l’eau croupie nauséabonde et destructrice. Cher Saint-Esprit, aide-nous aujourd’hui à consoler le cœur du Seigneur en tournant définitivement le dos à toutes ces citernes fissurées que nous avons pu nous construire, que nous ne cessons de nous construire et donne-nous de retrouver, de garder une foi suffisamment confiante pour boire à la source fraiche et toujours disponible de l’amour du Seigneur.

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