24 décembre : messe du matin. La grande différence entre la bonne volonté et la volonté bonne !

Comme je l’ai annoncé hier, je veux me concentrer sur la 1° lecture qui est un texte fondamental dans l’histoire du Salut puisqu’il annonce que le Messie sera de la descendance de David. Il faut bien comprendre que ce n’est pas juste un détail pour ceux qui sont passionnés de généalogie. En effet, ça va avoir une conséquence très concrète que nous réentendrons cette nuit. L’empereur ayant ordonné un recensement, chacun devait aller se faire recenser dans la ville de ses origines, la ville de ses ancêtres. Puisque Joseph était de la lignée de David, il fallait qu’il aille à Bethléem qui était la patrie de son illustre ancêtre. De fait, quand on lit le récit du choix de David au 1° livre de Samuel, au chapitre 16, nous trouvons ce renseignement précis : « Le Seigneur dit au prophète Samuel : descends chez Jessé de Bethélem, car j’ai vu parmi ses fils le roi que je veux. » Donc Bethléem, c’est bien la patrie de David et ça restera la patrie de ses descendants parmi lesquels, presque 1000 après David, il y aura Joseph. Et c’est donc à cause de cela que Joseph et Marie sont obligés de se mettre en route vers Bethléem dans ce moment si délicat où Marie est prête à accoucher.

Dimanche, nous avons entendu cet Evangile dans lequel Joseph était résolu de rendre sa liberté à Marie. Il voulait le faire parce qu’il pensait qu’il n’y avait plus de place pour lui dans cette histoire qui était en train de lier Marie au Seigneur d’une manière si particulière. Jamais Joseph n’a douté de Marie, mais comment pouvait-il imaginer rester dans cette histoire qui le dépassait à ce point ? C’est alors que l’ange lui avait expliqué qu’il ne devait pas se retirer car il y avait une place pour lui dans cette histoire et une vraie place. En plus d’assurer le nécessaire de la Sainte Famille, d’assurer sa protection, il y avait cette place que, seul, Joseph pouvait tenir : rattacher à la lignée de David l’enfant que Marie portait par l’action du Saint-Esprit pour que les Ecritures soient accomplies.

Voilà ce que nous dit déjà cette première lecture et ce n’est pas rien ! Elle nous aide à comprendre pourquoi ce couple de Nazareth est obligé d’aller à Bethléem alors que, en raison de l’état de grossesse avancée de Marie, il aurait été préférable d’attendre la naissance dans de meilleures conditions. Elle nous montre ainsi comment Dieu sera capable de faire feu de tout bois, ce recensement décrété par l’empereur n’était pas une bonne idée, mais d’un mal, Dieu peut toujours faire jaillir un bien. La prophétie concernant Bethléem pourra s’accomplir. Trop fort, comme aime dire les enfants ! 

Cette lecture nous permet de comprendre pourquoi on pouvait appeler Jésus : Fils de David et donc reconnaître en lui le Messie envoyé par Dieu. Tout cela s’explique par la promesse que Dieu avait faite à David et que nous avons entendue à la fin de la lecture : « je te susciterai dans ta descendance un successeur, qui naîtra de toi, et je rendrai stable sa royauté. Moi, je serai pour lui un père ; et lui sera pour moi un fils. Ta maison et ta royauté subsisteront toujours devant moi, ton trône sera stable pour toujours. » Voilà pourquoi ce texte de l’Ecriture est si fondamental que c’est une référence qu’on doit connaître par cœur : 2 S 7 !

Mais il y a encore autre chose d’absolument remarquable dans cette lecture et qu’il est très important de comprendre si nous ne voulons pas nous égarer dans notre vie spirituelle. Nous avons été témoins de cette très belle proposition, si généreuse que le roi David fait au Seigneur. Il explique au Seigneur, par l’intermédiaire de son prophète Nathan, qu’il n’est pas normal que lui, le roi, habite désormais dans un beau palais et que Dieu soit toujours sous la tente. Pour bien comprendre la pertinence de la remarque de David, il faut se rappeler que nous ne sommes pas si loin que cela de l’entrée en Terre promise. C’est Josué qui a permis au peuple d’y entrer. C’est lui qui présidera au partage de cette terre entre les 12 tribus. A sa mort, ce seront des personnages qu’on appelle « les juges » que Dieu choisira pour gouverner son peuple, il y en aura 12 qui vont se succéder. 

Puis vient ce désir qui monte dans le peuple d’avoir un roi. Dieu n’est pas bien d’accord, mais il sera obligé de céder. C’est le roi Saül qui deviendra ce premier roi et qui fera donc construire ce palais dans lequel habite David. Et c’est donc là que David réalise ce qu’il y a d’absolument anormal dans la situation : on a pensé au roi avant de penser à Dieu. On a construit un palais pour le roi en laissant Dieu sous la Tente comme pendant la traversée du désert. 

David veut réparer cette injustice et il fait part au prophète de son désir de construire un palais pour Dieu, un palais qui sera bien plus beau, bien plus grand que son palais à lui pour qu’on comprenne très bien qui est le boss ! David veut que ce soit clair aux yeux de tous : le boss, le vrai, c’est Dieu et non pas le roi. On aurait pu penser que Dieu félicite David pour ce magnifique projet. C’est d’ailleurs ce que pensait Nathan qui dira à David en allant un peu vite : « Tout ce que tu as l’intention de faire, fais-le, car le Seigneur est avec toi. »

Mais voilà qu’au cours de la nuit, Dieu convoque le prophète Nathan pour lui dire qu’il n’est pas du tout d’accord avec le projet de David. On n’y comprend plus rien ! Du coup, en lisant ces versets, il pourrait nous arriver de penser que, parfois, Dieu est vraiment compliqué, qu’il est bien difficile de le comprendre et de savoir comment lui faire plaisir ! Pourquoi Dieu ne se réjouit-il pas de ce projet qui, encore une fois, manifeste le grand cœur de David ? Pourquoi contrecarrer ce projet qui devait rétablir la justesse des rapports entre Dieu et le Roi ?

Il y a une petite formule que j’aime bien, elle dit que la bonne volonté, c’est bien, mais ce n’est encore pas la volonté bonne ! En effet David est plein de bonne volonté et ça nous touche, mais pour autant cette bonne volonté n’est pas encore une volonté parfaitement bonne, parfaitement ajustée à ce que Dieu attend de David et au-delà de David, de chacun de nous. Et c’est pour cela que Dieu va remettre David en place, c’est-à-dire qu’il va le remettre à sa juste place. C’est un peu comme si Dieu disait à David : n’inverse pas les rôles ! Ce n’est pas à toi de chercher ce qui est bon pour moi, c’est à toi d’accueillir ce que, moi, je veux te donner de bon. Ou dit autrement : arrête de toujours vouloir faire des choses pour moi et accepte de me laisser faire, accepte de te laisser faire.

Que de fois, il peut nous arriver d’être dans la même attitude que David. Que de fois où, poliment bien, sûr, nous voulons nous occuper de Dieu. Il peut nous arriver de penser que nous, nous savons très bien ce qu’il faudrait faire dans telle ou telle situation et nous le disons à Dieu. Encore une fois c’est discret, c’est poli, mais c’est réel et donc parfaitement tordu ! Vous connaissez cette boutade que l’on tire de l’entretien entre le vieux prêtre Eli et le jeune Samuel. Eli dit à Samuel : quand tu entendras le Seigneur, tu diras : parle Seigneur, ton serviteur écoute ! Et nous, nous avons tout renversé, quand nous allons prier, nous n’arrêtons pas de dire : écoute Seigneur, ton serviteur parle ! C’est-à-dire que, encore une fois, très poliment, dans notre prière, nous expliquons à Dieu ce qu’il devrait faire : fais ceci pour telle personne, fais cela pour moi, je te le dis parce que, avec tout ce qui se passe, je vois bien que tu n’as pas très bien compris ce qu’il faudrait faire ! C’est exactement ça : écoute Seigneur, ton serviteur parle ! Et, quand je te parle, je voudrais bien que tu m’exauces, c’est-à-dire que tu m’obéisses ! C’est l’attitude de David et c’est bien contre cette attitude que Dieu va réagir. 

Alors, merci Seigneur, en cette veille de Noël, de nous remettre en place, de nous remettre à notre juste place, c’est si souvent nécessaire ! Quand tu as envoyé Jésus, ton Fils bien-aimé, tu n’avais qu’une seule préoccupation : est-ce qu’ils vont accepter de le laisser faire ce que je lui ai demandé de faire en l’envoyant parmi eux ? Est-ce qu’ils vont accepter de se laisser faire ? Puisque tu as envoyé ta Parole, le Verbe fait chair, donne-nous la grâce de l’écoute et de l’accueil. Donne-nous cette grâce de ne pas vouloir sans arrêt te dicter ce que tu devrais faire pour mieux sauver le monde ! 

Cet article a 2 commentaires

  1. Ngendakuriyo

    Merci père Roger. Et joyeux Noël

    1. Franchellin Jean Marc et Agnès

      Avant toute chose, actions, veillées. Jesus à souvent veillé, il demandait aussi à ses disciples de faire de même… Pas toujours évident.
      L’aissez sa Parole m’interroger.
      Que ta volonté soit faite.
      Sur le chemin de l’Amour et de la Charité, tu seras toujours avec nous Jésus.
      Puisse, Noël, cette Espérance, amener la paix dans les foyers et dans le monde.
      En communion d’espérance.

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