28 décembre : Saints Innocents

Juste un mot sur la 1° lecture que je vous inviterai à relire dans la journée car elle propose un très bon résumé de ce que nous avons médité jusqu’à maintenant. Et je me permets de faire une petite synthèse pour permettre aux membres de la communauté de goûter un peu à ce que nous avons reçu. Hier, après avoir médité sur l’immense Amour de Dieu pour nous, son excès d’amour comme dit Paul dans la lettre aux Ephésiens, nous avons constaté l’ingratitude des hommes qui répondent à cet amour par le péché qui est fondamentalement un péché d’impiété, duquel découle tous les autres. Cette attitude aurait dû nous valoir la condamnation, mais Dieu n’a pas voulu que nous soyons enfermés dans cette désobéissance, il a voulu nous rendre justes et pour cela, il a envoyé Jésus et, ce matin, nous avons vu jusqu’où il a voulu nous aimer pour que nous puissions retrouver la grande et belle liberté des enfants de Dieu. Merci à la Providence qui nous a fait entendre ces versets qui font tellement bien écho à nos premières méditations et qui nous préparent à vivre le chemin de croix de cette après-midi. 

Je relis juste les derniers versets de la 1° lecture : « Mes petits enfants, je vous écris cela pour que vous évitiez le péché. Mais si l’un de nous vient à pécher, nous avons un défenseur devant le Père : Jésus Christ, le Juste.  C’est lui qui, par son sacrifice, obtient le pardon de nos péchés, non seulement les nôtres, mais encore ceux du monde entier. »

Venons en à l’Evangile, c’est un parfum de drame qui flotte aujourd’hui sur Bethléem avec ce massacre des saints innocents perpétré par Hérode qui oblige la Sainte Famille à fuir en Egypte. Je voudrais rapidement souligner 4 points.

1/ Un mot sur l’historicité de l’événement. Si vous lisez des commentaires sur cet épisode, il se pourrait que certains vous déstabilisent parce qu’ils remettent en cause la vérité de cet événement. Certains exégètes accusent l’évangéliste Matthieu d’avoir tout inventé pour livrer une magnifique composition littéraire qui lui permet de présenter Jésus comme le nouveau Moïse ! Et, pour appuyer leurs dires, ils expliquent que nulle part ailleurs, dans la littérature de l’époque, on ne trouve mention de cet événement dramatique. De fait, le grand historien de l’époque, Flavius Joseph, n’en parle absolument pas. Mais s’appuyer sur cet argument pour remettre en doute la vérité des faits, c’est oublier que Bethléem était un petit village et que ce massacre n’a donc pas provoqué la mort de milliers d’enfants mais de quelques dizaines seulement. Dans ces sociétés où la mortalité infantile était très répandue, la mort de quelques dizaines d’enfants, même s’il s’agit d’une mort violente et abjecte n’est pas un événement suffisant pour qu’il soit retenu comme marquant pour la grande histoire. Mais, évidemment, cet événement sera marquant pour l’histoire chrétienne qui, elle retiendra l’événement et voilà pourquoi en dehors de l’évangile de Matthieu, il n’y a pas de traces de cet événement.

Encore un mot sur ce point pour dire que ceux qui connaissent la personnalité d’Hérode ne sont absolument pas étonnés qu’il ait pu avoir une telle idée. Hérode était un tyran sanguinaire, il aura fait noyer son beau-frère, assassiner son beau-père, puis assassiner un autre beau-frère, ensuite c’est sa femme qu’il fait tuer et, puis deux de ses enfants et un troisième 5 jours avant de mourir ! Et enfin, il demandera qu’à sa mort soient assassinés un certain nombre de notables du pays, comme ça si on ne le pleure pas lui, on pleurera quand même à sa mort. Avec un tel homme tout est donc possible !

2/ Hier, je parlais de l’humanité de Jésus en soulignant qu’il a voulu tout connaître de ce que vivent les hommes, excepté le péché. Oui, il aura tout connu, même la difficile condition de réfugié. Il a fallu que la sainte famille parte, espérant que sur leur passage les gens ne leur ferment pas la porte au nez en leur expliquant qu’on ne peut quand même pas accueillir toute la misère du monde !

3/ Ils sont partis en Egypte et ils y ont été accueillis. Les chrétiens coptes d’Egypte aiment montrer les lieux où la Sainte Famille a été accueillie. Car elle a été accueillie et c’était en Egypte, le pays qui, pour les juifs, est le symbole même du mal. C’est d’Egypte que Dieu avait libéré son peuple parce qu’il avait entendu ses cris, il a eu pitié de ce peuple dont il a fait son peuple qui était réduit en esclavage par Pharaon et les égyptiens. Le pays symbole du mal qui devient le pays d’accueil, pour moi, c’est une invitation à ne jamais porter de jugements définitifs sur des pays, sur des peuples … ni sur les personnes d’ailleurs ! Cet exemple de l’Egypte qui accueille et l’exemple de Paul sur lequel nous ne cessons de méditer nous invite donc à porter un regard d’espérance sur les personnes et les peuples.

4/ Avec cet épisode dramatique du massacre des saints Innocents, il nous est dit que lorsque Dieu met en œuvre son plan de Salut, il va rencontrer les pires obstacles. C’était déjà le cas au moment de la naissance de Moïse préparé pour cette libération du peuple qui avait échappé miraculeusement à la cruelle décision de Pharaon de noyer tous les garçons à leur naissance. Quand Dieu veut libérer son peuple, les forces du mal se déchainent pour l’empêcher de réaliser son plan de Salut. Cette opposition va culminer avec la naissance de Jésus où le même massacre des nouveaux-nés est ordonné. Quand le Sauveur arrive sur terre, selon la vision de l’Apocalypse, le dragon est là pour essayer de l’avaler. Tout au long de son ministère, les forces du mal se sont déchainées contre Jésus cherchant à le faire taire, à le discréditer, à réduire à néant sa puissance de Salut. Finalement, il sera mis à mort, mais ce qui devait marquer le point final de cette histoire et sceller la victoire des forces du mal deviendra le lieu même du Salut, nous l’avons médité ce matin. Et ça ne s’est jamais arrêté ! Puisque les forces du mal n’avaient pu engloutir définitivement le Sauveur, elles pensaient avoir raison de ceux qui voulaient continuer son œuvre et c’est ainsi que des persécutions ont été déclenchées. Mais vous savez que les persécutions ont multiplié l’efficacité de l’évangélisation. En effet, les chrétiens qui se dispersaient pour échapper à la persécution, devenaient des évangélisateurs là où ils étaient arrivés ! Et l’histoire continue encore.

Je tire deux leçons de cette histoire dramatique :

  • D’abord un appel à l’espérance, mais quand je parle d’espérance, je ne parle pas d’optimisme, non, il s’agit bien de l’espérance théologale. Rien ne pourra arrêter la puissance de l’amour de Dieu. Depuis que Dieu a décidé qu’il se battrait pour sauver chaque homme et n’en perdre aucun, il a dû mener un combat éprouvant, mais jamais, il ne s’est fatigué, jamais il ne s’est lassé. Ce que Dieu a fait à l’échelle de l’histoire générale, il veut le faire pour toi. Jamais il ne se lassera de tout mettre en œuvre pour toi, pour ton Salut. Pour toi, pour te sauver, il est encore prêt à payer le prix fort !
  • Ensuite un appel à la résistance, au combat spirituel. Inutile de te lamenter sur les forces du mal qui se déchainent pour contrecarrer le projet général du Salut si toi, tu ne fais rien pour lutter, pour résister à ton niveau. Par sa grâce, ne te laisse pas vaincre par le mal, mais comme le dit Paul dans l’épitre aux Romains, sois vainqueur du mal par le bien !

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