6 janvier : la seule raison qui puisse justifier nos vies données !

Dans la 1° lecture, il y avait au détour de toutes ces belles affirmations sur l’amour, l’énoncé de la seule raison qui puisse justifier notre présence ici ! Je pourrais proposer un petit jeu en invitant chacun à relire le texte pour trouver l’énoncé de cette raison qui justifie notre présence ici ! Mais, comme nous n’avons pas tous le texte sous les yeux, je vais donner la réponse en sachant aussi que c’est ma réponse à moi et que vous auriez pu aussi trouver d’autres réponses ! Voilà cet énoncé qu’on trouvait dans la 2° partie de cette lecture : « Et nous, nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. » Mais je vous avoue que j’ai été aidé pour dire cela par un souvenir qui reste gravé dans ma mémoire.

Quand j’étais jeune, j’aimais aller dans un Carmel qui se trouve non loin de la communauté de Taizé, cette communauté qui accueille tant de jeunes. Quand j’étais jeune prêtre et que je m’occupais des jeunes, j’y ai souvent conduit des groupes. Evidemment, on ne passait pas nos journées avec les sœurs, mais on les voyait aux offices, on pouvait travailler avec elles, dans le silence, ça va de soi, elles avaient un très grand domaine et avaient toujours besoin de bras. Et le moment privilégié, c’est qu’elles acceptaient de passer une petite heure pour répondre aux questions des jeunes. Les sœurs étaient tellement rayonnantes que les jeunes en sortaient toujours dynamisés dans leur foi. Régulièrement, les jeunes leur demandaient : mais pourquoi avez-vous choisi de vous enfermer ici ? Et elles répondaient invariablement de la même manière : la raison est écrite au-dessus de la porte d’entrée du monastère ! Et au-dessus de la porte, vous l’avez deviné, c’était ce verset de St Jean qui était écrit : « Et nous, nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. »

Chez nous, il y a un certain nombre d’années, les gens pensaient et disaient volontiers qu’une jeune femme qui rentrait dans un couvent y entrait suite à une déception amoureuse ! Puisqu’elle avait été malheureuse dans ses amours humains, elle entrait au couvent pour pleurer toute sa vie cette déception ! Quelle horreur ! Ce verset de St Jean dit exactement le contraire ! Elles ne sont pas entrées au monastère parce qu’elles avaient perdu l’amour, mais, au contraire, parce qu’elles l’avaient trouvé ! Quand vous êtes assoiffés et qu’on vous indique où se trouve la source, vous y courrez ! Elles étaient toutes assoiffées d’amour et elles avaient trouvé la source et ça se voyait sur leurs visages qu’elles étaient heureuses. Et elles étaient tellement heureuses que, leur secret, elles le partageaient avec tous ceux qui voulaient se donner la peine de lire ce verset écrit au-dessus de la porte d’entrée : « Et nous, nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. » 

Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais pour moi, c’est la seule raison qui puisse justifier une vie donnée au Seigneur. Ce n’est évidemment pas une déception qui nous conduit à lui donner notre vie, ce n’est pas parce que nous n’avons pas trouvé l’amour que, faute de mieux, nous nous consacrons au Seigneur. Non ! « Nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. » 

Quand je m’occupais de jeunes, je devinais tout de suite quand il y en avait un qui était tombé amoureux, et ça se voyait surtout chez les garçons. Les garçons, à l’âge de l’adolescence, ils sont parfois un peu négligés, mal coiffés, pas toujours bien habillés, en tout cas, chez nous c’est comme ça ! Et puis un jour, un garçon souvent négligé, je le voyais arriver bien habillé, bien coiffé et sentant le parfum … j’avais tout de suite compris ! Quand quelqu’un est gagné par l’amour, ça se voit ! Mais quand quelqu’un est déçu par l’amour, ça se voit aussi !

Alors, nous pouvons nous interroger sur ce que nous donnons à voir personnellement et communautairement. Est-ce qu’en nous voyant, ceux qui passent voient des personnes qui rayonnent l’amour ? Est-ce que ceux qui passent voient une communauté qui rayonnent l’amour ? Est-ce qu’en nous voyant vivre, les gens auraient envie d’écrire à l’entrée du Foyer : « Eux, c’est sûr, ils ont reconnu l’amour que Dieu a pour eux, et ils y ont tellement cru qu’ils ont décidé de lui donner leur vie pour que beaucoup d’autres puissent à leur tour rencontrer cet amour. » Evidemment, ça ne veut pas dire que nous souhaitons que tout le monde rentre au Foyer en donnant sa vie au Seigneur ! Mais nous avons tellement été comblés par l’amour du Seigneur et il continue tellement à nous combler que nous voulons que tout le monde puisse trouver cette source. Et, non seulement nous voulons indiquer la source, mais surtout nous voulons donner à chacun les moyens de se désaltérer à cette source d’amour, les retraites sont faites pour ça car cet amour ne se tarira jamais et il donnera une saveur particulière à tous les amours humains. « Et nous, nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. »

Ça ne veut pas dire que, parce que nous avons reconnu l’amour et que nous y avons cru, il n’y aura plus de problèmes dans notre vie ! Oh si, il y en aura parce qu’il y en a Un qui n’est jamais content quand ils voient des femmes et des hommes trouver la source de l’amour et s’y désaltérer. Le malin, parce que c’est lui qui ne supporte pas qu’on vive de l’amour de Dieu, il va essayer de mettre un certain nombre de peaux de bananes pour essayer de nous faire déraper en espérant nous faire carrément sortir du chemin.

De ce point de vue, l’Evangile de la tempête apaisée que nous avons eu est très instructif. C’est Jésus qui oblige les disciples à monter dans la barque et voilà qu’au cours de la traversée une tempête assez terrible se lève. Les apôtres qui, pour la plupart, sont pourtant des pêcheurs aguerris, ont bien du mal à s’en sortir et peut-être aussi s’interrogent-ils : comment se fait-il qu’en obéissant à un ordre du Seigneur, on se retrouve aux prises à de telles difficultés ? Il pourra donc nous arriver de connaître, nous aussi, des tempêtes dans notre vie. En venant ici, comme les apôtres, nous avons obéi à un ordre du Seigneur, nous avons discerné que c’était sa volonté et nous avons voulu faire sa volonté et voilà qu’en étant fidèle à la volonté du Seigneur, nous nous trouvons soumis à des tempêtes. Et ces tempêtes pourront parfois nous faire peur tellement elles viennent remettre en cause de choses profondes en nous, comme la tempête qui remue profondément la mer, nous pouvons être profondément remués et voir remonter à la surface des choses que nous pensions définitivement réglées.

Eh bien, l’Evangile d’aujourd’hui nous donne cette certitude de foi : jamais le Seigneur ne nous abandonnera dans la tempête, il nous rejoindra toujours à un moment ou à un autre quand il verra que nous ne nous en sortons pas. Seulement voilà, il faut bien comprendre ces règles de la vie spirituelle parce que si nous ne sommes pas avertis, nous risquons de penser que ces tempêtes viennent remettre en cause nos choix profonds, qu’elles sont le signe que nous nous sommes trompés. Non ! Ces tempêtes sont le signe que le Malin cherche à nous mettre des peaux de bananes pour nous faire déraper ! Et s’il cherche à nous faire déraper, c’est précisément parce que nous sommes sur le bon chemin, mais, lui, il n’aime pas que les gens soient sur le bon chemin ! Ne rêvons pas d’une vie sans tempête, ça n’existe pas. Par contre croyons que le Seigneur viendra forcément à notre secours, crions vers lui sans perdre foi, il finira par monter dans notre barque et sa présence suffira largement à nous redonner confiance, à nous encourager à persévérer. C’est justement dans la tempête que nous aurons besoin de nous rappeler que « nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. »

Cette publication a un commentaire

  1. Adéline

    Amen !!! Alléluia !!!

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