14 septembre : La Croix glorieuse … quelle histoire !

Même si certains ont déjà entendu des éléments de cette histoire, vous me permettrez de commencer cette homélie en faisant un peu d’histoire pour comprendre l’origine de cette fête car cette histoire nous aidera aussi à en comprendre le sens. Tout commence en 312, si l’on en croit l’historien Eusèbe de Césarée. Constantin veut libérer l’empire romain de la tutelle de Maxence, réputé être un dictateur, mais il n’est pas très assuré quant à la réussite possible de son opération. 

En pleine interrogation sur les chances de mener à bien cette entreprise, il a une vision dans laquelle il lui est donné de voir dans le ciel un chrisme. Le chrisme, c’est ce signe antique qui représente le Christ avec les deux premières lettres grecques enchevêtrées de son nom, chi et rhô. Et, non seulement Constantin voit un chrisme, mais il le voit avec cette inscription : par ce signe tu vaincras. La nuit suivante le Christ lui-même lui confirme cette vision et lui demande de placer ce signe du chrisme sur son étendard. Plein de confiance, Constantin remplace donc sur son étendard l’aigle impérial par le chrisme et il le fait également graver sur les boucliers de ses soldats. 

Confiant, il va ensuite engager le combat, un combat dont il sortira vainqueur, c’est la fameuse bataille du pont Milvius. Cette victoire comptera beaucoup dans la décision de Constantin de donner aux chrétiens les mêmes droits qu’aux autres citoyens dans le fameux édit de Milan signé l’année suivante en 313. Constantin est converti, mais, puisqu’il n’y avait pas encore de « seconde pénitence », c’est-à-dire la possibilité de se confesser, pour obtenir le pardon de ses péchés, il attendra de se trouver sur son lit de mort pour être baptisé afin d’être lavé de tous ses péchés, juste avant sa mort, par ce baptême. Après sa conversion, sans doute aussi obtenue par les prières de sa mère Ste Hélène, Constantin favorisera la construction de nombreuses basiliques en terre sainte.

Cependant, à Jérusalem, c’est très compliqué car l’empereur romain Hadrien avait tout rasé dans la vieille ville. Il avait pris cette décision un peu folle pour agrandir la ville, mais aussi, sans doute, pour faire disparaitre le souvenir du lieu où Jésus avait été crucifié et où il était ressuscité, ce lieu attirant beaucoup trop de chrétiens à son goût ! Il a donc fait raser le mont Golgotha et tout mis de niveau pour construire par-dessus un forum avec, bien évidemment, un temple païen, il n’y avait donc plus aucune trace des événements concernant la fin de la vie de Jésus. 

Revenons à notre histoire, après sa victoire, Constantin envoie sa mère à Jérusalem ; Hélène n’est pourtant plus toute jeune, elle a environ 80 ans. Des fouilles sont entreprises pour retrouver des vestiges du Golgotha, elles sont guidées par St Macaire, l’évêque de Jérusalem du moment et, assez vite, le lieu sera retrouvé. En fouillant encore plus, on trouve une grande cavité dans laquelle un certain nombre de croix plus ou moins anciennes ont été mises un peu comme dans une décharge. Ste Hélène ordonne que l’on sépare les croix récentes des plus anciennes, et les endommagées des intactes. Pour elle, il n’y a aucun doute, la relique qui a touché le sang du Christ ne peut être brisée, elle doit être intacte. Il faut un certain temps pour faire le tri et c’est ainsi qu’on finit par isoler trois croix intactes, mais comment identifier celle qui fut la croix de Jésus parmi ces trois croix ?

C’est alors que la Providence va intervenir. Quand Ste Hélène s’était rendue sur le lieu où l’on avait isolé les 3 croix, elle avait rencontré une petite fille, assise sur le sol et recroquevillée contre un mur, pleurant à chaudes larmes. Ste Hélène lui avait demandé pourquoi elle était si triste et la fille lui avait expliqué que sa maman ne pouvait plus se lever et que le médecin avait expliqué qu’elle allait bientôt mourir. Hélène donne à l’enfant son manteau et quelques galettes au miel en lui demandant de les porter à sa mère et en l’assurant qu’elle prierait pour elle. Avant de la laisser partir, Hélène avait appris que cette fillette s’appelle Mariam et qu’elle était la fille de Simon, le cordonnier du quartier, et que sa maman s’appelait Ruth. 

Puisqu’Hélène était incapable d’identifier la croix de Jésus parmi ces 3 croix exhumées, elle a l’idée de faire venir Simon le cordonnier avec son épouse, Ruth. Elle les envoie chercher et une heure plus tard, ils arrivent, Ruth est sur une litière portée par deux hommes. C’est une femme chétive et très pâle. Ses lèvres sont sèches et ses joues creusées, comme si elle n’avait rien avalé depuis longtemps. 

Hélène s’approche et lui prend la main en disant : Je sais à présent pourquoi le Seigneur a voulu que mon chemin croise celui de ta fille. Elle demande à Simon d’approcher sa femme de la première croix pour qu’elle puisse la toucher. Sans comprendre, le cordonnier fait ce qu’il lui est demandé, rien de ne passe. On l’approche alors de la deuxième croix. Toujours rien ! Mais, à peine effleure-t-elle la troisième que son visage reprend des couleurs et, pour la première fois depuis des mois, elle se redresse seule et réclame à manger ! C’était le signe qu’Hélène attendait : ce miracle permet d’attester que la Vraie Croix est retrouvée ! Hélène s’empresse donc de demander à son fils, l’empereur Constantin qu’une basilique soit construite en ce lieu. Elle le sera et englobera dans une même construction le lieu du Golgotha et le lieu du tombeau, et portera le nom de basilique de l’anastasis, c’est-à-dire de la résurrection. Dommage que, par la suite, les occidentaux l’aient rebaptisée basilique du Saint-Sépulcre car, bien heureusement, le sépulcre n’est pas le dernier mot de l’histoire de Jésus !

C’est le 13 septembre 335, semble-t-il, que cette basilique a été consacrée. Constantin tenait à cette date car il voulait ainsi remplacer, par cette fête chrétienne, le jour où l’on fêtait Jupiter. La fête fut grande et belle et dura deux jours ! Le 13 avec la consécration de la basilique et le 14 avec la présentation de la Sainte Croix. C’est donc en souvenir de cette présentation de la Sainte Croix effectuée au lendemain de la consécration de la basilique qu’on célèbre la fête de la Croix Glorieuse, le 14 septembre. Fin de la partie historique !

Je ne dis que quelques mots sur le sens de cette fête car c’est étonnant qu’on parle de Croix glorieuse alors que la croix est un horrible instrument de supplice, en français on peut dire qu’il s’agit d’un oxymore, cette figure de style qui consiste à allier deux mots de sens contradictoires ! Oui, mais cet oxymore nous dit quelque chose d’essentiel sur la manière d’agir de Dieu face au mal. Dieu n’a pas choisi de désintégrer le mal d’en haut, en utilisant un puissant fusil-laser céleste ! Il a choisi de le prendre sur lui pour mieux l’anéantir. C’est en portant sa croix et en y étant cloué que Jésus s’est rendu victorieux du mal. Ainsi donc, quand nous souffrons, quand nous traversons des épreuves trop lourdes, nous pouvons croire qu’elles ne nous écraseront pas puisque Jésus, avant nous, les a vécues pour qu’elles ne nous anéantissent pas même si elles nous blessent profondément/

Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons la grâce d’accueillir les flots d’amour qui ne cessent de couler du haut de la Croix par le cœur toujours ouvert de Jésus.

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